La déconstruction du mythe de la justice dans la reprise d’Antigone de Jean Cocteau. Plaidoyer pour un accent nouveau en droit et littérature (Law and Literature)

Introduction

La tragédie de Sophocle s’ouvre à Thèbes sur un tableau de guerre civile déchirant la famille des Labdacides, la famille d’Œdipe vouée à une éternelle malédiction. Deux frères, Etéocle et Polynice, fils d’Œdipe, meurent dans des combats sans merci. Créon, roi de Thèbes et allié d’Etéocle dans une tentative commune de restauration de l’ordre établi, décide par décret que Polynice, accusé de traîtrise envers sa patrie, sera privé de sépulture. Avec la dépouille du fils d’Œdipe, livrée en pâture aux oiseaux charognards, l’État impose, en public, son pouvoir. La reprise de Cocteau, au début de la pièce, résume parfaitement, dans les premières répliques d’Antigone adressées à sa sœur Ismène, les enjeux dramatiques de la situation :

ANTIGONE : […] Etéocle aura l’enterrement qu’il mérite, mais il a défendu d’ensevelir Polynice ou de le pleurer. On le laisse aux corbeaux. Tels sont les ordres que le noble Créon promulgue pour toi et pour moi, oui pour moi. Il va venir en personne, ici même, lire son décret[1].

La princesse Antigone, fille d’Œdipe, dont le dévouement familial suscite l’admiration des dieux eux-mêmes, se rebelle contre le décret et entreprend de rendre les honneurs dus au rang de son frère. Défié dans son autorité, Créon la condamne à mort, faisant fi de l’amour qui l’unit à son propre fils, Hémon. Dès qu’elle fut jouée dans l’amphithéâtre, au siècle de Périclès, en 440, en plein apogée athénien, cette tragédie subjugua le public qui sentit d’emblée la puissance des clivages anthropologiques qui structurent les conflits de l’humanité. Comme le dit Georges Steiner[2], tout est ramené à des oppositions fondamentales entre les hommes et les femmes, les jeunes et les vieux, les individus et l’État, les morts et les vivants, les hommes et les dieux.

Un autre faisceau d’oppositions et de ruptures porte sur la justice et le droit, à travers les représentations des déesses de la justice, Thémis et sa fille Diké. Faut-il privilégier le droit de la Cité et le bien public, au détriment des lois primitives des hommes, lois non écrites car ordonnées par les dieux ? Au fil des siècles et des reprises et des commentaires, qu’on songe à Hegel ou à Hölderlin, sans oublier la critique moderne et contemporaine, de Georges Steiner à François Ost, Antigone s’affirma ainsi comme une œuvre juridique, en raison du contraste saisissant qu’elle offre au plan de la théorie historique du droit, entre le droit positif, légitimé par le pouvoir, émanant d’un prince ou d’une assemblée, et le droit naturel fondé sur le respect de la nature de l’homme, respect reposant sur l’éthique, c’est-à-dire l’art d’être juste, ou la « justice naturelle » selon Aristote[3].

Sur le plan de la recréation littéraire, les adaptations modernes d’Antigone sont nombreuses en Europe, de Marguerite Yourcenar (1936) à Berthold Brecht (1948), par exemple. En France, Cocteau (1922) et Anouilh (1944) ont repris cette même tragédie à douze ans d’intervalle. Les deux versions diffèrent, l’une par son esthétique classique moderne, l’autre par son traitement décalé du registre tragique. Ce sont pourtant deux « pièces imbriquées », comme le signale Éléonore Antzenberger. En dépit de leurs divergences esthétiques, elles œuvrent en effet dans le même sens, celui « d’une révolte sans cesse alimentée par une réflexion sur l’art dramatique[4] ». Elles furent d’ailleurs jouées toutes deux dans le célèbre Théâtre de l’Atelier à Montmartre. En 1922, après des années de modernisme extrêmement fécond, Cocteau adopte avec son Antigone une esthétique classique, au plus près du texte de Sophocle qu’il « contracte » néanmoins. Le poète s’inspire de Raymond Radiguet, qui a lui-même actualisé dans Le Bal du comte d’Orgel le chef-d’œuvre de Madame de Lafayette, La Princesse de Clèves. Radiguet comme Cocteau s’inscrivent dans ce retour aux sources classiques qui est propre aux années vingt et sur lequel Cocteau a écrit une sorte de manifeste de poésie critique intitulé significativement Le Rappel à l’ordre. Dans la préface, l’écrivain évoque lui-même sa démarche d’artiste moderniste arrivant « chez les muses sévères[5] ». Cette arrivée s’accompagne d’un positionnement intellectuel et moral plus à droite, sous l’influence des échanges avec Jacques Maritain. Inséré dans Le Rappel à l’ordre, Le Secret professionnel, publié la même année qu’Antigone, éclaire le parti pris artistique qui justifie la « contraction » de la pièce, « Le vrai écrivain est celui qui écrit mince, musclé[6] » affirme le poète. L’ascendant d’André Gide[7] et de l’équipe de l’austère NRF, principale référence en matière de classicisme moderne, a également compté. De même Paul Morand, l’ami de toujours, qui « moule ses lettres » avec clarté, rapidité et sobriété « sous les couleurs de son style baroque[8]. » Jacques Copeau, l’un des fondateurs de la NRF et directeur du Théâtre du Vieux-Colombier, se trompait donc lorsqu’il déclara en janvier 1914 : « Cocteau ne sera jamais des nôtres[9]… »

Pour plusieurs raisons, la version d’Antigone de Jean Cocteau est, en fait, à l’avant-garde de ce mouvement classique moderne. Si le classicisme de cette reprise, marqué par la perfection formelle en tous points de l’art de la tragédie, est bien réel, il n’étouffe pas pour autant son modernisme, avec notamment « l’extrême vitesse de l’action[10] », symptôme d’une époque, les Années folles, secouée d’une vitalité maladive, après la catastrophe de la Grande Guerre. Le 20 décembre 1922, au Théâtre de l’Atelier, la mise en scène de Charles Dullin, la musique d’une figure éminente du Groupe des Six, Arthur Honegger, le décor de Picasso, les costumes de Chanel spiritualisent ce culte de la vitesse. Le tour de force des acteurs, avec Antonin Artaud dans le rôle de Tirésias, reste cependant la principale contribution au succès de la pièce qui, de l’aveu de son créateur, « brûle les petites stations et roule vers le dénouement comme un express[11] ». La vitesse fait surgir un nouveau sentiment du tragique, auquel Morand donnera la version romanesque dans L’Homme pressé[12] en 1941.

Mais le modernisme le plus accompli ne se voit pas, il réside dans une inspiration et une genèse qui bouleversent les principes conventionnels de composition. En octobre 1922, en compagnie de Radiguet, Cocteau est au Cap Nègre, à proximité du Lavandou dans le Var, puis à Pramousquier, distant de quelques kilomètres, lorsqu’il reçoit en cadeau une canne de berger grec qui lui livre d’un coup toute la mythologie des rivages méditerranéens : « elle me suggéra de recoudre la peau de la vieille tragédie grecque et de la mettre au rythme de notre époque. Je commençai par Antigone[13]. » Le génie de l’hyper-artiste opère ensuite, dans l’urgence. La genèse de sa « contraction » est brève. Écrite en un mois, elle est un dialogue, à travers Sophocle, entre la voix de l’Antiquité et le souffle de l’extrême contemporain. Il imagine, par exemple, la musique de Honegger : « un seul instrument, comme si un berger jouait, n’est-ce pas une idée saisissante[14] ? » propose-t-il au compositeur. L’élan de Pramousquier façonne ainsi le style des répliques en une série de performances qui réinvente, grâce au travail sur le rythme, les langages de la tragédie. Comme nous le verrons, Cocteau expérimente sa « poésie de théâtre[15] » en considérant l’écriture comme le premier spectacle, en concurrence avec l’intrigue de la pièce.

C’est justement au cœur de cette création stylistique aux multiples interprétations, parfois contradictoires, que le contenu juridique de l’Antigone de Cocteau doit être évalué, et non pas au seul prisme des fonctions informative et référentielle du texte. C’est cet accent nouveau, le droit saisi par la stylistique, sur lequel nous aimerions insister au cours de la présente étude, centrée sur les processus de déconstruction chez Cocteau. La première étape passe par une confrontation des différentes visions de la justice héritées de la mythologie. Tour à tour sujet et objet de la déconstruction, l’Antigone de Cocteau orchestre les conflits. Dans des ouvertures vers notre modernité, pratiquées au cours des dialogues, le poète privatise ensuite l’idée de justice, en vue d’une extension des droits subjectifs. La troisième et dernière étape se situe dans l’inscription d’un mythe personnel de la justice résultant d’une appropriation du mythe d’Antigone. Chemin faisant, nous verrons comment la réflexion sur le droit dépend d’une écriture théâtrale qui introduit dans « le labyrinthe du style » pour « en goûter les moindres détours et s’y perdre[16] », selon le vœu du poète dans Secrets de beauté.

Autrement dit, il s’agira pour nous de comprendre la crise des valeurs juridiques, intériorisée et décrite ensuite par Cocteau, à partir d’une étude stylistique qui verra dans la restructuration formelle du paradigme de la justice un appui du discours, qui donne du sens à la rébellion d’Antigone.

Antigone et les conflits des justices

L’idée de justice est complexe chez les Grecs, elle ne fait pas l’objet d’une rationalisation, mais elle est le fruit d’un imaginaire juridique que des poètes, comme Sophocle, ont modelé. Ainsi la déesse de la justice, Thémis (θέμις) n’est pas habitée par l’esprit de géométrie, même si la représentation statuaire de la déesse Thémis développe des effets de symétrie et d’équilibre, avec les deux plateaux de la balance, et de contraste, entre le bras droit levé et le gauche alourdi par le glaive, prêt à trancher. Le regard voilé d’un bandeau, en signe d’impartialité, complète la symbolisation. Telle est Thémis qui siège à l’Olympe, aux côtés de son époux, Zeus, qu’elle conseille. De cet imaginaire religieux, résulte une idée abstraite de la justice, à force de pureté et d’idéalisation, qui confine au tragique. C’est pourquoi, Sophocle recourt avec parcimonie à Thémis dans Antigone. On note cependant une occurrence significative au vers 880 qui commence par Thémis, au moment où l’héroïne, confrontée à son destin fatal, rend hommage une dernière fois à Hélios : θέμις ὁρᾶν ταλαίνᾳ. Ce vers, omis par Cocteau à force de contraction, est traduit sous cette forme par Paul Mazon : « Infortunée, je n’aurai plus le droit de contempler l’éclat de ce flambeau sacré[17]. » Le passage de Thémis à « droit » s’explique par la charge symbolique de régulation des destins qu’exerce la déesse. Le latin est également partie prenante, Thémis est « Justitia » pour les Romains, mot dérivé de « jus », « juris » (droit, justice).

Diké, fille de Zeus et de Thémis et donc déesse elle-même, enrichit la mythologie juridique de la Grèce antique. Diké est davantage proche des hommes, elle accompagne les larmes et les faiblesses coupables de l’humanité gémissante. C’est à Diké (Δίκας) que se réfère le chœur pour décrire la souffrance d’Antigone : προβᾶσ᾽ἐπ᾽ἔσχατονθράσους ὑψηλὸν ἐς Δίκας βάθρον. La traduction de Pierre Mazon est explicite : « Tu as voulu aller au bout de ton audace, et tu en es venue brutalement buter contre le haut piédestal où se dresse la Justice[18]. » Celle de Cocteau est un résumé : « C’est ta faute. Tu as violenté la justice[19]. » Comme l’écrit François Ost, Diké « s’humanise dans la tragédie, se laïcise, se politise en s’associant aux progrès de la démocratie, au débat juridique et politique, au développement des lois[20]. » Ces distinctions entre Thémis et Diké justifient la présence dominante de cette dernière dans cette tragédie où les enjeux du pouvoir politique sont mêlés aux affaires privées. Quant à « nomos » (ὁ νόμος), loi en grec ancien, le mot est largement cité par Sophocle, « nomos » signifie, selon Jacqueline de Romilly, « l’idéal abstrait du bon ordre et les simples habitudes observées par la pratique[21] ». On respecte les lois divines, les lois politiques et les lois non écrites, « ces lois sont inscrites par les dieux dans la conscience des hommes[22] », ajoute la grande helléniste.

Antigone met en tension cet imaginaire juridique. D’un côté, Créon fait valoir le droit de la Cité, Polynice ne peut être enterré avec les honneurs, dès lors qu’il a porté atteinte aux intérêts vitaux de Thèbes. En affirmant la suprématie de la Polis, le décret de Créon relègue au second plan les circonstances d’ordre privé et familial. Croyant incarner la raison d’État, Créon pense œuvrer définitivement en faveur du bien public. Mais cette conception d’un droit protecteur de la cohésion de la Res publica se heurte à des visions antagonistes. Créon a d’abord contre lui les dieux. L’âme de Polynice, privée de sépulture, vouée à une errance sans fin, les offense. Créon combat ensuite la conception exclusivement familiale d’Antigone. Héroïne de la famille, la fille d’Œdipe édifie son propre univers autour de « l’amour identitaire des siens[23] », selon la formule de François Ost, ce qui signifie que pour elle les lois de la famille, insufflées par les dieux, surpassent toutes les autres. On a souvent dit qu’Antigone agissait par hubris, cet orgueil humain puni des dieux ; en réalité, elle est mue par une pulsion de la famille la rendant rebelle à tout ordre, politique ou juridique, placé en travers de son destin. Telle est la vérité d’Antigone que Cocteau a bien saisi à la fin de La Machine infernale quand elle supplie son père, de sa voix d’enfant, de l’emmener avec elle, afin de soulager ses souffrances. Sa passion pour les siens la condamne aux yeux du Chœur qui prononce les arrêts du destin, dans le texte de Sophocle : « qui se charge du pouvoir ne veut pas voir ce pouvoir transgressé[24] ».

Du fait de cette confrontation, Antigone est bel et bien un mythe du droit mettant en lumière une impossible hiérarchie entre un droit dicté par un pouvoir souverain et légitime, le droit positif, et un droit émanant d’un ordre naturel, respectueux des lois universelles de l’humanité fondées sur la part juste qui revient à chacun. Les ouvrages de Paul Ricœur, notamment Soi-même comme un autre, qui repense l’édifice politique selon l’idéed’une « vie bonne, avec et pour autrui, dans des institutions justes[25]» et les travaux de Martha C. Nussbaum[26], dédiés à l’éthique, au droit et à la littérature, montrent que les débats d’Antigone demeurent des questions contemporaines. Par ailleurs, Antigone est aussi une interrogation sur le respect des libertés et des choix personnels dans ce qu’on appelle aujourd’hui un État de droit.

L’une des finalités de la contraction de Cocteau est justement de radicaliser plus encore les antagonismes juridiques transmuant la passion familiale d’Antigone et son délit en un absolu de rébellion, à la fois politique, juridique et artistique. Au cœur de cette transformation, Antigone est à la fois sujet et objet de la déconstruction du mythe de la justice.

Antigone, sujet et objet de la déconstruction

Dans la confrontation centrale entre Antigone et Créon, Cocteau met en scène au cours d’une réplique d’Antigone la crise des valeurs juridiques qui invalide le décret, perçu comme injuste au regard des lois non écrites inspirées des dieux :

ANTIGONE : Jupiter n’avait pas promulgué cette défense. La justice non plus n’impose pas des lois de ce genre ; et je ne croyais pas que ton décret pût faire prévaloir le caprice d’un homme sur la règle des immortels, sur ces lois qui ne sont pas écrites, et que rien n’efface. Elles n’existent ni d’aujourd’hui, ni d’hier. Elles sont de toujours. Personne ne sait d’où elles datent. Devais-je donc, par crainte de la pensée d’un homme, désobéir à mes dieux[27] ?

Cocteau a réduit au minimum cette réplique, beaucoup plus développée dans le texte de Sophocle car c’est l’une des plus importantes. Par compensation, il recourt à des ressources stylistiques d’une grande efficacité comme l’usage très travaillé de la négation. La réplique est effectivement structurée par des morphèmes de négation, grâce auxquels le discours d’Antigone tente de déconstruire la loi de Créon et déstabiliser son pouvoir. L’efficacité repose sur la pratique alternée de la négation simple (« n’avait pas », par exemple) et de la négation composée. Les effets de discontinuité de cette dernière (« la justice non plus », « et que rien n’efface », « ni d’aujourd’hui, ni d’hier ») opèrent comme une sorte de validation des arguments au fur à mesure qu’ils s’énoncent. Ce cheminement trouve sa conclusion dans l’interrogation oratoire, en laquelle l’accent mis sur le préfixe négativant du verbe « désobéir » donne tout son sens à la révolte d’Antigone. À la variété des modèles syntaxiques de la réfutation et du refus s’ajoute la multiplicité des constituants (« Jupiter », « la justice », « ces lois » et leur reprise anaphorique, « Personne ») qui accable littéralement Créon, d’autant que sur cette chaîne le « je » d’Antigone se détache singulièrement : « Je ne croyais pas que ton décret… ». En s’appuyant ainsi sur les dieux et la tradition, Antigone affirme son autorité personnelle et l’exerce contre l’arbitraire de Créon. Les formules de rabaissement (« le caprice d’un homme », « la pensée d’un homme ») agissent dès lors comme une destitution de la condition de Roi de Thèbes.

Jusqu’à sa « marche au supplice », Antigone conservera cette posture de négation que la version de Cocteau intensifie avec une syntaxe de la privation, que renforcent des parallélismes, des gradations, des réitérations du négatif :

ANTIGONE : Rien. Rien. Rien et personne. Je marche au supplice toute seule, sans qu’on me plaigne, sans mari, sans ami, sans encouragements. Je ne verrai plus le jour. Je ne verrai plus son œil d’or. Je ne verrai plus le soleil[28].

L’énonciation particulièrement structurée contient le pathos pour se focaliser sur la seule énergie de l’héroïne qui accepte la conséquence de sa solitude orgueilleuse, à savoir l’arrachement aux consolations de l’humanité.

Les distorsions entre les différentes lois, celles d’Antigone et celles de Créon, montrent toute la difficulté du processus d’institution d’un ordre juridique juste, capable de prendre en compte à la fois les intérêts de la Cité, les traditions ancestrales et les composantes privées et familiales qui évoluent en permanence, au gré de nouvelles émotions. Ce combat entre le bien public et le bien privé constitue le facteur essentiel de la tension dramatique, laquelle est à son paroxysme dans la suite de la confrontation. La contraction de Cocteau rend à merveille l’intensité du débat que visualise une courte didascalie : « Antigone et Créon se parlent de tout près ; leurs fronts se touchent[29]. »

Créon, qui ne peut pas se laisser convaincre, entend déconstruire, argument par argument, la position d’Antigone, ce qui le pousse à commettre à l’encontre de sa nièce un véritable « meurtre » par les mots[30], selon l’expression d’Hölderlin. Pour traduire cette violence, Cocteau recourt à un usage classique de la stichomythie basé sur toute une gamme de ruptures et de reprises de mots. Dans la séquence suivante, les reprises inversées neutralisent les forces en présence, avant un nouvel assaut verbal :

CRÉON : Tu es la seule à Thèbes qui pense mal.

ANTIGONE : Alors ils pensent tous mal, mais ils se taisent en ta présence.

CRÉON : N’as-tu-pas honte ?

ANTIGONE : Honte d’honorer un frère[31] ?

Cocteau dote néanmoins les protagonistes de traits élocutoires distinctifs et de modèles délibératifs bien différenciés, et en cela il prend le parti d’Antigone. Sur le plan de la syntaxe, le langage de Créon se distingue par des constructions disloquées (dans ses répliques comme dans ses tirades), signe de hâte et d’incertitude, malgré les apparences de fermeté. À Ismène qui ne peut concevoir sa vie sans Antigone, sa sœur, il réplique, alors qu’elle est toujours en vie : « N’en parle plus. Elle est morte[32]. » Deux syntagmes, tranchants comme le glaive, suffisent à détruire les liens de tendresse entre les deux sœurs. Cette brutalisation a son équivalent dans l’emploi d’un registre trivial, en décalage avec les enjeux de la tragédie familiale. La révolte d’Ismène (« Tu vas tuer la fiancée de ton fils ! ») appelle de sa part une fausse indifférence pleine de vulgarité qui discrédite son autorité : « Il trouvera d’autres ventres[33] ». Avec ce répertoire, Créon ressemble plus à un personnage shakespearien qu’à un protagoniste de tragédie classique.

En revanche, les tirades d’Antigone sont dominées par une harmonie syntaxique, reflet du bien-fondé de son geste, lequel est mu par un principe de vertu familiale :

Je t’ai aussi fermé les yeux Polynice — et — j’ai — eu — raison. Car jamais je n’aurais fait cet effort mortel pour des enfants ou un époux. Un époux, un autre peut le remplacer. Un fils, on peut en concevoir un autre. Mais comme nos parents sont morts, je ne pouvais espérer des frères nouveaux. C’est en vertu de ce principe que j’ai agi, qu’on me frappe, que Créon me prive du mariage et de la maternité[34].

Par ces assemblages syntaxiques autour d’un noyau lexical centré sur la parenté, la filiation et le culte funéraire, la délibération d’Antigone établit un ordre familial qui joue un rôle régulateur au sein de la société de la Grèce antique. C’est à partir de cet ordre qu’elle pose les jalons d’une nouvelle justice marquée par l’approche du particulier et du subjectif et non plus de l’universel dicté par le politique.

L’approche du subjectif dans le processus de justice

Une telle approche est en fait la finalité de cette tragédie réécrite par Cocteau, c’est le sens qu’il faut donner à son projet initial de « la mettre au rythme de notre époque ». Le poète classique moderne détourne ainsi l’usage de la stichomythie au profit de « l’extrême vitesse de l’action » qui renvoie en réalité au temps inquiet des années vingt et, grâce à son génie de l’avenir, à nos interrogations contemporaines en matière de justice. À ce titre, la séquence suivante de confrontation entre Antigone et Créon est l’une des plus révélatrices :

ANTIGONE : La mort veut une seule loi pour tous.

CRÉON : Mais l’envahi et l’envahisseur ne doivent pas être traités également.

ANTIGONE : Qui sait si vos frontières ont un sens chez les morts ?

CRÉON : Jamais un ennemi mort ne devient un ami.

ANTIGONE : Je suis née pour partager l’amour, et non la haine[35].

Selon les indications de Cocteau, la vitesse ne doit pas « empêcher les acteurs d’articuler beaucoup et de remuer peu[36] », de parler peu en l’occurrence. C’est ce qui se passe dans cette scène où chaque réplique, réduite au minimum, concentre au maximum le sens de chaque attaque. L’effet de lamento, ce lyrisme propre à la tragédie qui doit toucher les cœurs, est stoppé net, si bien que la confrontation entre un homme et une femme apparaît dans une sorte de dureté primordiale. Signe de modernisme, l’extrême concision du mot met sur la scène de théâtre le langage en relief, au point que le spectateur voit une intrigue dans chaque réplique qui tend à déréaliser l’action principale. En poète moderniste, l’un des meilleurs, Cocteau joue ainsi avec la matière verbale et la musique du signifiant, comme dans cette phrase de Créon (« Jamais un ennemi mort ne devient un ami[37] ») dominée par l’allitération du m. Est-ce par souci d’harmonie imitative révélant la cruauté du tyran injuste ? Non, Cocteau, en visiteur assidu de la planète surréaliste, sait laisser libre cours au langage, il sait enchaîner par imagination des variations sur le même thème, bref, il sait, autre « secret de beauté », que « toute belle écriture est automatique[38]. » Cette fascination pour la musique du mot, qui sépare le signifiant du signifié (mot et idée/action), creuse un décalage dans lequel naît non plus une réflexion mais une rêverie sur le droit, dans sa fonction de préserver le sujet de l’oppression et de la tyrannie. Sans perdre le fil du monde antique, cette « poésie de théâtre », propre à Cocteau, confirme son modernisme, Giraudoux s’en souviendra dans ses reprises théâtrales des mythes.

Dans l’écriture de Cocteau, le sens fait une si brusque apparition sur la scène du langage que le public applaudit intérieurement, tel ce mot de « frontières » saisi en diérèse, pour aller plus vite, dans un alexandrin à l’intonation ouvrante, qui réfère indirectement à l’actualité traumatisante de 1922. Les dix millions de morts de la Grande Guerre se moquent désormais des frontières. Le style, à la limite de la notation télégraphique, met ainsi à nu une conscience, celle d’Antigone, qui transforme une douleur publique en drame privé. C’est le mouvement même de Cocteau qui écrit dans Démarche d’un poète : « J’ai sans doute, à notre époque où l’homme se désindividualise au bénéfice de groupes, commis le péché d’individualisme. » Cet individualisme qui « s’acharne à désobéir[39] » est positif, il souffle au personnage d’Antigone le réagencement des émotions au sein de la justice trop dure de Créon : « Je suis née pour partager l’amour, et non la haine[40] ».

L’Antigone de Cocteau réoriente ainsi le mythe du côté d’une plus grande prise en compte du souci privé, du souci de soi dans l’action en justice. Ce souci privé, le poète l’a bien exprimé dans une réplique en laquelle Antigone parle de « cher crime[41] » quand elle décrit, de l’intérieur, sa désobéissance. Cocteau modernise la princesse en voulant faire d’elle un sujet de droit, doté de prérogatives agrandies en matière de droits subjectifs et plus particulièrement de droits familiaux, conformément au sens de la pièce. Au début, Cocteau structure les dialogues en vue d’insister sur cette question. La fille d’Œdipe revendique ainsi haut et fort son droit privé et familial dans une réplique réduite à cette question : « A-t-il donc le droit de me détacher des miens ?[42] » Cette nouvelle revendication se situe, qui plus est, dans le contexte de l’après-guerre qui voit une nouvelle affirmation des droits des femmes contre la soumission. Antigone cherche à inverser l’ordre injuste dominé par le masculin que lui présente Ismène : « Nous sommes des femmes, Antigone, des femmes malhabiles à vaincre des hommes[43]. » Cette voix de femme (« Je suis née pour partager l’amour, et non la haine[44]. ») conserve intact son message à notre époque puisqu’elle conseille, en définitive, de mieux prendre en compte l’amour, et ses approches toutes personnelles, dans l’élaboration des lois et de l’État de droit.

Cette idée est récurrente chez Cocteau. En mai 1912, il crée au Théâtre du Châtelet un argument chorégraphique, Le Dieu bleu, qui met en scène dans l’Inde antique une jeune fille qui, en s’opposant de manière délictueuse à l’entrée de son amoureux dans le culte divin, provoque la colère du Grand Prêtre, ce dernier la condamnant au supplice. Mais empli « d’une félicité bouddhique [qui] se répand sur toutes choses[45] », le Dieu bleu émerge, dénoue le conflit, et libère la jeune fille. L’amour a influencé la décision du juge divin. D’une œuvre à l’autre, Cocteau déconstruit dans le mythe de la justice, la notion de loi et de règle juridique commune. L’exemple d’Antigone invite, selon lui, à aller plus loin dans l’individualisation des cas traités en justice. Ce que fit le poète au cours de sa réflexion sur la peine de mort en 1953. Il dénonça une justice qui négligeait, à cause de l’importance démesurée accordée à la norme collective, la dimension proprement « subjective » du coupable. Pour lui, « Il est certain que la justice ne peut être objective. Un tribunal groupe des individus à réactions subjectives[46]. »

Mais la déconstruction s’accompagne d’un véritable besoin d’injustice afin de se révéler à soi-même, tout en réclamant plus de droit. Ce que Antigone demande à sa sœur, au moment de l’épreuve, « j’espère que tu vas montrer ta race[47] », vaut également pour elle. Or, le besoin d’injustice fait partie des processus créateurs chez Cocteau, c’est l’injustice qui définit sa condition d’artiste. Cocteau éclaire ce positionnement dans son film, Le Testament d’Orphée, tourné en 1959, film dans lequel le poète au tribunal, accusé de « crime d’innocence », fait de la « désobéissance un sacerdoce. » La sentence est prononcée par Heurtebise, ce personnage emblématique de l’univers poétique de Cocteau :

Vous êtes accusé d’innocence, c’est-à-dire d’atteinte à la justice en étant capable et coupable de tous les crimes, au lieu de l’être d’un seul, apte à tomber sous le coup d’une peine précise de notre juridiction[48].

La déconstruction de toutes les propriétés symboliques, et également concrètes, de la justice, équité, impartialité, respect de la norme juridique, établissement de la preuve proportionnalité et exécution de la peine, circonstances atténuantes, etc., se trouve d’un coup réalisée par ce chef d’accusation d’un genre nouveau. Le poète transforme ainsi pareille posture de coupable, épris paradoxalement d’injustice et de révolte contre la loi, en ressource créative, d’où cette confidence à Jacques Maritain : « Or, l’instinct me pousse toujours contre la loi. C’est la raison secrète pour laquelle j’ai traduit Antigone[49]. » Un tel besoin d’injustice, pour être soi et dénoncer les faux semblants des tribunaux et des lois, Cocteau l’a effectivement transposé dans son héroïne, au point de déclarer : « Antigone est ma sainte[50]. » Le plus frappant, en définitive, est que Cocteau fait de l’injustice un nouveau droit[51].

Conclusion

On peut certes envisager un tel cri de révolte, à travers cette reprise de la tragédie de Sophocle, comme une utopie juridique, forcément loin des cas douloureux, car bien réels, qui sont jugés dans les différentes juridictions, notamment en cour d’assises. Mais la littérature aide à comprendre la part irréductiblement subjective qui motive un passage à l’acte réprimé par la loi. Par exemple, on peut faire le rapprochement entre l’Antigone de Cocteau, qui est en état de légitime sauvegarde de l’intérêt familial, face à une loi qui le nie, et une affaire contemporaine de tragédie familiale, l’affaire Catherine Sauvage survenue en 2012. Cette épouse et mère a été jugée et condamnée en 2014 pour avoir tué son mari, alors qu’elle était victime de violences conjugales répétées et qu’elle tentait de protéger les siens. Les polémiques qui ont suivi sur la notion de légitime défense préméditée dans le cas de violences conjugales et l’intervention in fine de la grâce présidentielle en 2016 prouvent qu’il n’est pas facile de trancher sous le signe commun du glaive, tant le justiciable présente des réactions subjectives qui remettent en question les lois, le droit et la jurisprudence. La littérature est donc nécessaire afin que le droit puisse élargir le champ du subjectif. La seule qualification des faits ne peut suffire, l’écriture littéraire aide à inverser le décor, parfois trop rationnel, du discours juridique. Le mouvement droit et littérature permet ainsi de rappeler l’utilité de l’imaginaire en droit, pour que soit réaffirmée, et enseignée, la définition de Giraudoux : « Nous savons tous ici que le droit est la plus puissante des écoles de l’imagination. Jamais poète n’a interprété la nature aussi librement qu’un juriste[52]. »

Pour autant, cette complicité que le droit entretient avec la littérature ne peut se limiter aux messages de la fiction et de ses récits, elle doit se nourrir de cette vérité première de toute écriture littéraire qu’est le style. Dans le texte de création, à vocation juridique, comme c’est le cas avec l’Antigone de Cocteau, œuvre d’un grand styliste, le droit ne surgit pas seulement du récit mythique, il émerge du rythme, des prouesses de la syntaxe, de la plasticité du mot, du travail sur des modalités spécifiques, comme nous l’avons vu avec la négation, bref, il surgit des ressources de la langue que l’artiste sait mettre en œuvre. Cet accent nouveau, que nous avons voulu dégager, fait dépendre, au sein d’une œuvre, la saisie du contenu juridique d’une construction stylistique qui bataille souvent à rebours de l’ordre conventionnel du sens. C’est aussi une manière de replonger le droit dans son milieu naturel, qui est l’intimité avec le langage et ses possibilités de création. Est-ce à dire que raconter le droit dans un texte littéraire ne suffit pas ? La démarche est bien sûr pertinente mais il faut aussi se demander ce que le style d’un écrivain peut révéler du phénomène juridique.


[1] Jean Cocteau, Antigone, édition publiée sous la direction de Michel Décaudin, avec la collaboration de Pierre Caizergues, Pierre Chanel, Gérard Liéber, Francis Ramirez, Christian Rolot et Jean Touzot, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2003, p. 307- 308.

[2] Georges Steiner, Les Antigones, trad. de Philippe Blanchard, Paris, Gallimard, 1992, p. 253.

[3] Sur ces questions, on se référera à l’article de Philippe Pichot Bravard, « Le mythe d’Antigone », dans Droits, mythes et légendes, T.1, Quentin Le Pluard et Marion Talbot (dir.), avec une préface de Peggy Larrieu, Paris, Éditions Mare & Martin, 2022, p. 99-102.

[4] Éléonore Antzenberger, « Cocteau, Anouilh et Ionesco, des pièces imbriquées », Magazine littéraire, Jean Cocteau et les écrivains, et les arts, David Gullentops (dir.), n°32, 2013, p. 14.

[5] « Encore cinq années de marche, et un jeune Parisien, mal dégourdi, arrive chez les muses sévères », Jean Cocteau « Préface », Le Rappel à l’ordre, dans Romans, poésie, œuvres diverses, présentations et notes de Bernard Benech, dessins de Jean Cocteau et Giorgio de Chirico, Paris, Livre de poche, « La Pochothèque », 1995, p 423.

[6] Jean Cocteau, Le Secret professionnel, dansRomans, poésie, œuvres diverses, op. cit., p. 485.

[7] Même si en la circonstance, Gide n’apprécie pas l’Antigone de Cocteau qu’il découvre au théâtre du Vieux-Colombier, territoire de la NRF, lors d’une représentation donnée le 15 janvier 1923. « Intolérablement souffert de la sauce ultra-moderne à quoi est apprêtée cette pièce admirable, qui reste belle, plutôt malgré Cocteau qu’à cause de lui ». André Gide, entrée du 16 janvier 1923, Journal, cité par Gérard Liéber dans sa notice d’Antigone, op. cit., p. 1656.

[8] Cité dans une autre partie du Secret professionnel intitulé D’un ordre considéré comme une anarchie, op. cit, p. 534.

[9] Cité par Pierre Bergé, Album Cocteau, biographie et iconographie par Pierre Bergé, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2006, p. 73

[10] Indiqué dans la première didascalie de la pièce Antigone, op. cit., p. 307.

[11] Jean Cocteau, « La Jeunesse et le Scandale », conférence faite à l’université des Annales le 27 février 1925, Conférencia, n°18, 1er septembre 1926, p. 272-285. Cité dans la notice de Gérard Liéber, op.cit., p. 1654.

[12] Paul Morand, L’Homme pressé, Paris, Gallimard, 1941.

[13] Jean Cocteau, Le Cordon ombilical, Paris, Plon, 1962, p. 25.

[14] Malou Haine, « Lettres inédites de Jean Cocteau à Arthur Honegger », Cahiers Jean Cocteau, nouvelle série n°4, Jean Cocteau et la musique, David Gullentops (dir.), Paris, Michel de Maule, lettre du 17 octobre 1922, p. 50-51.

[15] Dans Un rêve de Mallarmé, ouvrage dédié à la modernité, Cocteau définit ce style : « La poésie de théâtre est de la poésie faite exprès pour le théâtre » (Montpellier, Fata Morgana, 2005, p. 23).

[16] « La poésie ne peut agir que comme un charme physique, lequel est fait d’une foule de détails qui ne se distinguent pas d’un coup d’œil, sinon il est impossible d’exiger d’un autre, distrait par ses propres préoccupations, de s’introduire dans le labyrinthe d’un style, d’en goûter les moindres détours et de s’y perdre. » Jean Cocteau, Secrets de beauté, édition et présentation par Pierre Caizergues, Paris, Gallimard, 2013, p. 20.

[17] Sophocle, Tragédies, trad. Paul Mazon, préface de Pierre Vidal-Naquet, Paris, Folio/Gallimard, 1973, p. 124.

[18] Ibidem., p. 123.

[19] Jean Cocteau, Antigone, op.cit., p. 43.

[20] François Ost, Raconter la loi ; aux sources de l’imaginaire juridique, Paris, Odile Jacob, 2004, Paragraphe 23, [en ligne]. Url : https://journals.openedition.org/laboratoireitalien/447

[21] Jacqueline de Romilly, La loi dans la pensée grecque. Des origines à Aristote, Paris, Les Belles Lettres, 1971, p. 23.

[22] Ibidem, p. 34.

[23] François Ost, Raconter la loi, op.cit., paragraphe 5.

[24] Sophocle, Tragédies, op.cit., p. 124.

[25] Paul Ricoeur, Soi-même comme un autre. Le soi et l’identité narrative, Paris, Seuil, 1990, p. 202.

[26] Notamment l’ouvrage de Martha C. Nussbaum, La fragilité du bien. Fortune et éthique dans la tragédie et la philosophie grecques, Paris, Éditions de l’Éclat, 2016 qui comporte un chapitre sur Antigone : « Antigone : conflit, vision et simplification ».

[27] Jean Cocteau, Antigone, op. cit, p. 312.

[28] Ibidem, p. 318.

[29] Ibid., p. 313.

[30] « Ainsi, il nous faut considérer ce qui est brutalement meurtrier, le meurtre effectivement issu de la parole […] », Friedrich Hölderlin, Remarques sur Œdipe, Remarques sur Antigone, trad. et notes par François Fédier. Préface par Jean Beaufret, Paris, UGE, « Bibliothèque 10-18 », 1965, p. 81.

[31] Jean Cocteau, Antigone, op. cit., p. 313.

[32] Ibidem, p. 314.

[33] Idem.

[34] Ibidem, p. 319.

[35] Ibid., p. 313

[36] Ibid., p. 307.

[37] Ibid., p. 313.

[38] Jean Cocteau, Secrets de beauté, op. cit., p. 42.

[39] Cité par David Gullentops dans sa présentation de Démarche d’un poète, Magazine littéraire, op.cit., p. 31 pour les deux citations.

[40] Jean Cocteau, Antigone, op. cit., p. 313.

[41] « Pour moi, j’enterrerai. Il me sera beau de mourir ensuite. Deux amis reposeront côte à côte après ce cher crime. », Jean Cocteau, Antigone, op. cit., p. 308.

[42] Ibidem, p. 308.

[43] Idem.

[44] Ibidem, p. 313.

[45] Jean Cocteau, Le Dieu Bleu, dans Théâtre complet, op. cit., p. 7.

[46] Extrait du chapitre « De la peine de mort », dans Jean Cocteau, Journal d’un inconnu, Paris, Grasset, 1953, p. 75.

[47] Jean Cocteau, Antigone, op. cit., p. 308.

[48] Le dialogue du film est restitué dans Le Testament d’Orphée, Le Sang d’un poète, Éditions du Rocher, Monaco, 1983, p. 66.

[49] Jacques et Raïssa Maritain, Œuvres complètes, vol. III, 1924-1929, Éditions universitaires Fribourg Suisse, Editions saint Paul Paris, 1985, p. 682.

[50] Dans les Notes intitulées, Antigone place de la Concorde, dans Théâtre complet, op. cit. p. 327.

[51] Cocteau est en effet sensible à cette question, « Dans un bel article, Paul Claudel dit que l’homme a droit non seulement à la justice mais à l’injustice » note-t-il dans Secrets de beauté, op.cit., p. 32.

[52] Réplique d’Hector au cours d’un échange sur les « règles internationales » au moment des conflits dansJean Giraudoux, La Guerre de Troie n’aura pas lieu (1935), Acte II, scène 5, dans Théâtre Complet, édition établie, présentée et annotée par G. Tessier, Paris, Livre de Poche, coll. « la Pochothèque », 1991, p. 512.

Pour citer cet article

Gil Charbonnier, "La déconstruction du mythe de la justice dans la reprise d’Antigone de Jean Cocteau. Plaidoyer pour un accent nouveau en droit et littérature (Law and Literature)", Cahiers JC n°21 : Cocteau et les arts de la scène, [en ligne], 2023, 1p, consulté le 04/11/2024, URL : https://cahiersjeancocteau.com/articles/la-deconstruction-du-mythe-de-la-justice-dans-la-reprise-dantigone-de-jean-cocteau-plaidoyer-pour-un-accent-nouveau-en-droit-et-litterature-law-and-literature/