Il était communément admis que le manuscrit autographe de La Machine infernale avait disparu, supposément détruit lors d’une crise de colère de Marie-Laure de Noailles, jalouse de la liaison entre Jean Cocteau et Natalie Paley. Or, à la surprise générale, ce manuscrit est réapparu en mars 2012, lors de la vente aux enchères de la collection Serge Lifar[1], et a rejoint la collection du Musée des Lettres et Manuscrits. Toutefois, en avril 2015, la fermeture de ce musée en raison des activités frauduleuses d’une société affiliée a entraîné de nouvelles ventes et la dispersion irrémédiable de la collection[2]. L’identité du nouveau propriétaire du manuscrit de Cocteau demeurant inconnue, ce document de source primaire n’est actuellement plus accessible.
Nous avons eu cependant l’opportunité d’examiner ce manuscrit durant le bref intervalle précédant la fermeture définitive du musée. Par ailleurs, d’autres institutions[3] conservaient des dactylogrammes et des fragments du manuscrit témoignant des différentes étapes de l’élaboration, ce qui nous a permis de retracer l’ensemble du processus d’écriture dramatique de manière continue et ininterrompue. C’est cet objectif qui constitue la motivation principale de la présente étude[4].
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La première mention de La Machine infernale par Cocteau apparaît dans une note de son journal d’une désintoxication, Opium, rédigé en grande partie durant sa cure à la clinique de Saint-Cloud, entre la fin décembre 1928 et avril 1929 :
Je rêve qu’il me soit donné d’écrire un Œdipe et le Sphinx, une sorte de prologue tragi-comique à Œdipe-Roi, précédé lui-même d’une grosse farce avec des soldats, un spectre, le régisseur, une spectatrice.
Représentation allant de la farce au comble de la tragédie, entrecoupée de mes disques et d’un tableau vivant : Les Noces d’Œdipe et de Jocaste ou La Peste à Thèbes[5].
Œdipe-Roi a probablement été entamé au cours de l’été 1925, en parallèle avec le texte de l’opéra-oratorio Œdipus Rex à la demande d’Igor Stravinsky, et achevé principalement en octobre de la même année, comme l’atteste la mention finale. Par la suite, après une période de révision, Œdipe-Roi a été publié en janvier 1928 sous la forme d’une édition combinée avec Roméo et Juliette. Cette « adaptation libre d’après Sophocle » a toutefois dû attendre près de dix ans avant d’être représentée pour la première fois[6]. Il est donc compréhensible que, lorsqu’il a écrit ces lignes dans Opium, Cocteau recherchait une possibilité de mise en scène pour cette nouvelle pièce encore en attente. Bien entendu, il ne pouvait pas prévoir que cette idée initiale de prologue et de farce évoluerait par la suite en une œuvre de grande envergure.
Ce que Cocteau désigne dans Opium comme Œdipe et le Sphinx ou « une sorte de prologue tragi-comique » correspondrait à l’acte II de la future Machine infernale, intitulé « La Rencontre d’Œdipe et du Sphinx ». Quant à ce que l’on pourrait qualifier de prologue du prologue, cette « grosse farce » trouverait son équivalent dans l’acte premier, « Le Fantôme », où apparaissent deux soldats ainsi que le spectre de Laïus, ancien roi de Thèbes. Bien que « le régisseur » et « une spectatrice » ne figurent pas dans la version finale de la pièce, cet élément extérieur et métathéâtral semble avoir été transposé dans le personnage de la Matrone, une ménagère thébaine qui, dans l’acte II, raconte avec passion les malheurs causés par le Sphinx et exprime son souhait de voir l’avènement d’un dictateur, résonnant ainsi potentiellement avec la réalité politique des années 1930. Par ailleurs, le tableau vivant intitulé Les Noces d’Œdipe et de Jocaste suggère un lien avec l’acte III, « La Nuit de Noces », tandis que l’adaptation d’Œdipe-Roi, qui devait constituer le corps principal de la représentation, se concrétise dans l’acte IV portant le même titre. En somme, les composantes majeures des quatre actes de La Machine infernale sont déjà esquissées dans cette première ébauche[7].
Ce passage d’Opium est souvent cité en relation avec la genèse de La Machine infernale. Cependant, on admet généralement que Cocteau a rédigé sa pièce en 1932, soit trois ans après la rédaction de ce passage. Cette datation semble reposer principalement sur deux éléments : d’une part, la mention « Saint-Mandrier 1932 » figurant à la fin de l’édition publiée ; d’autre part, quelques lettres adressées par Cocteau à sa mère et à Natalie Paley durant l’été 1932, dans lesquelles il évoque à plusieurs reprises l’avancement de la pièce[8]. Il convient toutefois de noter que ces lettres ne mentionnent que les actes III et IV. Or nous savons que Cocteau a composé d’abord l’acte II, suivi de l’acte premier, puis les actes III et IV[9]. La période de rédaction des deux premiers actes pourrait donc remonter à une date antérieure, probablement jusqu’à l’année 1930, pour les raisons suivantes.
La mention finale de l’édition publiée indique uniquement le lieu et l’année d’achèvement de l’œuvre, tandis que les versions antérieures fournissent également des précisions sur le début de la rédaction : « Chablis 1930 — Saint-Mandrier 1932[10] ». Bien que les dates exactes du séjour de Cocteau à Chablis en 1930 ne soient pas clairement établies, une lettre de Georges Auric adressée à Cocteau, ainsi qu’une lettre de ce dernier à sa mère, confirment sa présence à Chablis entre le printemps et l’été de cette année-là[11].
En outre, il existe des documents connexes importants, présentés par Christoph Wolter dans son ouvrage Jean Cocteau et l’Allemagne[12]. Hans Feist, traducteur allemand de La Voix humaine, a écrit à Cocteau le 22 avril 1930 pour s’enquérir de l’état d’avancement de sa « nouvelle pièce[13] », exprimant son souhait de la représenter à Berlin, conjointement avec La Voix humaine, et lui demandant de lui faire parvenir le manuscrit. Feist aurait été informé de cette « nouvelle pièce » soit par Cocteau lui-même, soit par un tiers. Quoi qu’il en soit, Cocteau lui a envoyé un ensemble de textes que Feist a ensuite traduit en allemand.
Cette version allemande de La Mort du Sphinx — Der Tod der Sphinx — est conservée sous la forme d’un dactylogramme relié à la Bibliothèque historique de la ville de Paris (BHVP)[14]. Le contenu en est le suivant :
- Vorbemerkung [Préface]
- Prolog [Prologue]
- Erster Teil : Das Gespenst und die Soldaten [Première partie : Le Spectre et les soldats]
- Der Sprecher [Le Speaker]
- Zweiter Teil : Die Begegnung des Oedipus mit der Sphinx [Deuxième partie : La Rencontre d’Œdipe avec le Sphinx]
Bien que le manuscrit en français adressé par Cocteau à Feist demeure introuvable, il est néanmoins possible d’en reconstituer le contenu grâce aux versions françaises existantes. La première mention de la « Vorbemerkung » apparaît ainsi dans les premiers manuscrits autographes sous le titre « La Mort du Sphinx »[15]. Il ne s’agit pas tant d’une préface traditionnelle que d’une note de mise en scène, spécifiant l’ordre de représentation de chaque partie, ainsi que les décors, les éclairages et les effets sonores. L’utilisation des disques, évoquée dans Opium, y est également prévue[16]. Un autre point notable réside dans la double perspective conçue pour la représentation : d’une part, La Mort du Sphinx conserve sa fonction de prologue tragi-comique à Œdipe-Roi ; d’autre part, une représentation autonome de cette œuvre est également envisagée[17]. Cette ambivalence suggère que La Mort du Sphinx recelait déjà le potentiel de devenir une pièce indépendante.
Le « Prolog » est une scène de tableaux vivants, qui diffère de celle mentionnée dans Opium. Cette nouvelle scène présente trois figures allégoriques ou mythologiques : la Nuit, Mercure et l’Amour. Elle n’apparaît que dans les premières versions des manuscrits et dactylogrammes. Le corps principal du texte, intitulé « Erster Teil : Das Gespenst und die Soldaten » et « Zweiter Teil : Die Begegnung des Oedipus mit der Sphinx », correspond directement aux deux premiers actes de la future Machine infernale et coïncide presque entièrement avec leurs premières versions dactylographiées[18]. Le texte succinct de « Der Sprecher », inséré entre ces deux parties principales, se fonde sur une version qui constitue l’ancêtre direct de « La Voix », que l’on retrouve juste avant l’acte II de la pièce[19].
La lettre de Feist du 22 avril 1930 mentionnée ci-dessus est suivie d’un courrier daté du 13 février 1932, marquant ainsi une pause considérable. Comme cette lettre fait déjà référence au contenu de Der Tod der Sphinx, cela permet d’inférer, comme l’a observé Wolter, que Cocteau a envoyé ses brouillons à Feist entre ces deux dates, soit entre la fin avril 1930 et février 1932. Comme indiqué précédemment, Cocteau précise à la fin des brouillons qu’il a entamé la rédaction de la pièce à Chablis en 1930. Si l’on suppose que ce séjour à Chablis a eu lieu, comme évoqué, entre le printemps et l’été 1930, il est possible d’estimer que l’écriture a débuté durant cette période. Il est donc probable que l’acte II a été rédigé entre le printemps-été 1930 et 1931, suivi de l’acte premier, au plus tard avant le début de 1932.
On pourrait qualifier cette période de « première phase de rédaction » de La Machine infernale, à distinguer d’une « seconde phase de rédaction » correspondant à l’écriture des actes III et IV. Durant la première phase, bien que la pièce manifeste déjà un potentiel pour devenir une œuvre autonome, elle conserve encore la structure d’un « prologue » à l’adaptation d’Œdipe-Roi. Cependant, dans la seconde phase, l’œuvre d’origine — Œdipe-Roi —intègre l’acte IV de la pièce, rendant ainsi invisible le point de départ en tant que prologue et amorçant un processus rapide vers son achèvement en une pièce en quatre actes. Il apparaît donc que l’essence même de l’œuvre a subi une transformation profonde entre ces deux phases d’écriture.
La seconde phase de rédaction, couvrant la période d’écriture des actes III et IV, peut être précisément datée grâce aux lettres adressées par Cocteau à sa mère et à Natalie Paley, comme mentionné précédemment. Le 22 juillet 1932, depuis Saint-Mandrier, près de Toulon, Cocteau écrit à sa mère : « Je voudrais pouvoir écrire le dernier acte du Sphinx » – l’expression « le dernier acte du Sphinx » semble désigner l’acte III de la pièce achevée[20]. Trois semaines plus tard, le 13 août, il informe sa mère et Natalie qu’il a achevé l’acte III et qu’il commencera « l’épilogue » (acte IV) dans la soirée[21]. Quatre jours plus tard, le 17 août, il envoie un télégramme à Natalie pour annoncer la fin de cette rédaction : « Ai fini acte[22]. » Cette date correspond à un jour près à celle inscrite sur la couverture du manuscrit autographe de l’« Épilogue », qui porte la mention : « Œdipe et le Sphinx / Épilogue / 18 août 1932[23]. » On peut donc estimer que l’écriture de l’acte III s’est déroulée entre la fin juillet et le 13 août 1932, suivie immédiatement par celle de l’acte IV, achevée aux alentours du 17 ou 18 août.
Cocteau fait une lecture complète de sa nouvelle pièce au début du mois de septembre à la Villa Blanche, propriété des Bourdet à Tamaris, près de Saint-Mandrier[24]. En octobre, il reçoit la version dactylographiée de l’œuvre[25]. C’est à ce moment que la pièce s’intitule définitivement La Machine infernale. Cependant, de nombreuses modifications continuent d’être apportées au texte, même après que Cocteau a confié la mise en scène à Louis Jouvet en janvier 1933 et lui a remis une copie du dactylogramme en mars, probablement en tenant compte des suggestions de ce dernier. Les brochures de la répétition n’ont été prêtes qu’à la fin de décembre 1933, voire un peu plus tard[26], mais des retouches mineures ne cesseront d’être apportées durant les trois mois et demi précédant la première représentation. Ce processus est confirmé par les nombreuses annotations, vraisemblablement de la main des acteurs, visibles sur chaque exemplaire de leur brochure.
La Machine infernale est créée le 10 avril 1934 à la Comédie des Champs-Élysées, et le texte est publié par les éditions Bernard Grasset. L’édition originale que nous avons consultée (8e édition) porte une date de dépôt légal au 30 mai 1934. Nous avons également examiné les éditions ultérieures, notamment celle du tome V des Œuvres complètes de Jean Cocteau, publiée par les éditions Marguerat en 1948 ; celle du tome II du Théâtre, parue aux éditions Bernard Grasset en 1957 ; celle du Théâtre complet dans la collection Bibliothèque de la Pléiade chez Gallimard en 2003 ; ainsi que celle des Œuvres dans la collection Bibliothèque Grasset, la plus récente étant parue en 2023. Ces rééditions corrigent les coquilles de l’édition originale, mais n’apportent pas de variantes significatives.
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Quelles perspectives nouvelles une approche génétique de l’œuvre pourrait-elle apporter ? Nous nous limitons ici à souligner quelques points essentiels. Rappelons que La Machine infernale a été initialement conçue comme un prologue à Œdipe-Roi, une « adaptation libre » de la tragédie de Sophocle. Ce processus de création génère une double référence : l’adaptation renvoie à l’œuvre originale, tandis que la future pièce se réfère à cette adaptation. Cette dynamique référentielle se déploie tout au long de la première phase de rédaction de La Machine infernale. L’acte II a d’abord été conçu comme un prologue à Œdipe-Roi ; la scène des tableaux vivants (mettant en scène la Nuit, Mercure et l’Amour) comme un prologue à l’acte II ; et enfin l’acte premier comme un prologue à l’acte II. La scène des tableaux vivants est ainsi devenue un prologue aux deux premiers actes, avant d’être abandonnée à un stade relativement précoce, au profit de « La Voix ».
De cette structure d’autoréférences en abyme émergent des personnages relativement extérieurs au mythe d’Œdipe proprement dit, voire des figures métathéâtrales, telles que le fantôme de Laïus dans l’acte premier, véritable citation scénique de Hamlet de Shakespeare, ou encore la Matrone dans l’acte II, qui fait allusion, comme évoqué précédemment, à la situation sociale et politique de l’époque. Anubis, issu de la mythologie égyptienne, pourrait également figurer dans cette liste. Quant au Sphinx, il apparaît sous les traits d’une charmante jeune fille, mais se révèle être en réalité Némésis, déesse de la vengeance. Le Sphinx lui-même l’ignore jusqu’à ce qu’Anubis le lui révèle. Cependant, à la fin de l’acte II, il devient clair que Némésis assumait simultanément les rôles du Sphinx et de la jeune fille — ou que les dieux l’y avaient contrainte. Il en découle une double chaîne réversible de jeu ou de déguisement : Némésis ⇄ Sphinx ⇄ Jeune fille, à laquelle on pourrait ajouter une autre boucle métathéâtrale, celle de l’actrice incarnant ces personnages.
Un cas similaire de transition identitaire se manifeste dans l’acte III. Au cours du cauchemar d’Œdipe, Anubis apparaît et répète, à sa place, des répliques du Sphinx issues de l’acte précédent. Dans le manuscrit autographe ainsi que dans le dactylogramme qui le suit, c’est d’abord la voix du « Sphinx du songe » qui est mentionnée, avant d’être corrigée en « Anubis du songe » sur ce même dactylogramme, pour devenir finalement « Anubis » tout simplement dans le dactylogramme suivant. Par ailleurs, ces fluctuations d’identité contaminent Œdipe somnolent, qui à son tour divague en prononçant des incantations du Sphinx.
Il en va de même pour les concepts de mise en scène qui s’écartent du cadre théâtral conventionnel, qu’ils aient été retenus ou non dans la version finale de la pièce. Outre les tableaux vivants et l’utilisation des disques, déjà évoqués dans une page d’Opium, il convient de noter l’influence du contexte cinématographique dans les premières esquisses de la pièce. Dans le manuscrit autographe en trois feuillets intitulé « La Mort du Sphinx », faisant partie de l’ensemble de documents que Cocteau a envoyé à Feist sous ce même titre, figurent ces phrases révélatrices : « 1er et 2ème acte se déroulent sous un éclairage de lune aussi sûr que celui de certains soleils de cinématographe », ainsi que « Dans la salle, de l’endroit où se trouvent d’habitude les cabines cinématographiques, un haut-parleur déclame le poème “Le Théâtre Jean Cocteau”, disque Columbia ». Ou encore cette indication, ajoutée après la suppression de la scène des tableaux vivants : « Après les trois coups, on baisse un écran sur lequel on projette au fur et à mesure le texte du prologue. » Cocteau semble ainsi intégrer des éléments propres à la mise en scène cinématographique dans l’espace théâtral.
Bien que ces idées n’aient pas été conservées telles quelles dans les versions ultérieures, on retrouve néanmoins, dans la brochure du programme de la première, deux textes qui évoquent explicitement ce contexte cinématographique. Le premier, intitulé « Théâtre & cinématographe », aborde les possibilités et les limites de l’interpénétration entre ces deux formes artistiques ; le second, « Quelques mots dans le programme », s’ouvre sur un dialogue entre une mère et son fils lors d’une projection du film italien Christus. Cocteau cherchait-il ainsi à préserver une approche cinématographique, préparant les spectateurs dès la lecture du programme ? Cela semble plausible, d’autant que, selon notre hypothèse de datation, la période d’écriture de La Machine infernale a débuté à peu près au même moment que le tournage de son film Le Sang d’un poète.
En guise de dernière remarque, citons quelques répliques saisissantes du Sphinx, présente uniquement dans les premières versions. Dans l’acte II, après la sortie de la Matrone et de ses enfants, Anubis s’adresse au Sphinx : « […] le premier réflexe des humains après la mort, c’est la honte, une honte énorme d’avoir vécu. » Ce à quoi le Sphinx répond :
LE SPHINX
Eh bien… cette honte, je voudrais en conserver le goût, moi, lorsque j’aurai repris mes prérogatives. Oui, Anubis… traite-moi de niaise ou de folle — mais notre éternité je l’imagine plate, plate, plate et notre sérénité fade et notre symétrie, notre beauté, vues d’en bas, me donnent le vertige, soulèvent le cœur. Je devine qu’il y manque je ne sais quoi d’inimitable. Tiens, oui, j’ai trouvé, Anubis, je devine qu’il y manque le sel. Le sel ! Sur la terre c’est le sel qui me frappe. Je le goûte sur ma peau, sur mon épaule, sur ma bouche. Le sang a du sel, un sel superbe et il reste un sel que je voudrais connaître… le sel des larmes.
Accablée par l’oppression des dieux qui lui ordonnent de tuer, le Sphinx finit par éprouver le vrai sel des larmes :
ANUBIS
Vous !… Vous ! vous pleurez…
LE SPHINX (en larmes)
C’est une bonne chose, mon chien, une très bonne chose. Je m’en doutais, laisse-moi pleurer.
ANUBIS (avec stupeur)
Vous !
LE SPHINX
Pas moi, le moi auquel tu penses. C’est une petite fille qui pleure, Anubis, qui titube, et qui n’en peut plus de fatigue, qui n’en peut plus[27].
Dans la version finale, la représentation du Sphinx ne laisse plus transparaître une telle faiblesse humaine. Cocteau a soigneusement façonné la complexité de sa personnalité afin d’atteindre un équilibre subtil, ce qui expliquerait la suppression de ces répliques. Il est néanmoins crucial de souligner qu’une fragilité extrême se manifestait dans les premières versions, révélant une profondeur cachée dans la psyché du personnage. Cette compréhension permet d’appréhender la construction dramaturgique du Sphinx sous un nouvel éclairage, montrant que Cocteau a délibérément atténué certains aspects de son humanité pour mettre en avant d’autres caractéristiques, peut-être plus énigmatiques et immortelles, dans les versions ultérieures.
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Les diverses versions des manuscrits autographes et des dactylogrammes de La Machine infernale, examinées et décrites dans la présente étude, sont répertoriées dans le tableau ci-dessous, intitulé « Composition des textes ». Quant aux documents issus de l’ancien Musée des Lettres et Manuscrits (MLM), dont l’emplacement actuel demeure non identifié, ils sont provisoirement référencés sous le nom de ce musée aujourd’hui disparu.
Le manuscrit autographe de l’ancien MLM, bien qu’il présente des lacunes importantes dans l’acte II, livre une version presque intégrale des trois autres actes. Il comprend également des textes annexes, tels qu’une « Dédicace », deux premières « Épigraphes » extraites de Baudelaire, une liste des « Personnages » et une « Voix » placée avant l’acte premier, faisant office de préface pour l’ensemble de la pièce, de même que des projets de titre, un « Prologue — Tableaux vivants » supprimé au cours de l’écriture, enfin le premier dactylogramme de l’acte premier. Le manuscrit autographe porte de nombreuses marques de révision, ce qui en fait un document révélateur du processus de création de l’œuvre. Nous avons tenté de consigner, dans la mesure du possible, les modifications textuelles présentes sur ce manuscrit ; toutefois, certains mots et phrases biffés demeurent indéchiffrables. Par ailleurs, la Bibliothèque historique de la Ville de Paris (BHVP) conserve également des manuscrits autographes contenant des indications scéniques pour La Mort du Sphinx, le texte de « Speaker », des projets de titres, ainsi que des notes comportant des fragments de répliques.
Quant aux dactylogrammes, un total de six a été recensé : un comportant uniquement l’acte premier, deux se limitant à l’acte II, et trois englobant les quatre actes. Chacun de ces dactylogrammes présente des corrections manuscrites, révélant ainsi au moins deux états distincts : le texte dactylographié initial et celui modifié après révisions manuscrites. La version finale du manuscrit autographe correspond étroitement au texte de la première version dactylographiée, tandis que la version finale de chaque dactylogramme est presque identique à celle de l’état suivant.
Le plus ancien dactylogramme existant est celui de l’acte II, conservé à la Bibliothèque de l’Université Keio, qui succède directement au manuscrit autographe. Relié par Georges Leroux, il comprend un feuillet placé en guise de frontispice, portant un titre et un dessin de la scénographie réalisés par Cocteau lui-même. Le titre, initialement inscrit comme « La belle et la bête / 2 tableaux vivants / Prologue pour Œdipe Roi », a été biffé et remplacé par « L’antiquité / 2 tableaux vivants ». Ce feuillet est suivi d’une description détaillée des « Personnages » et du « Décor ». Ces caractéristiques suggèrent que Cocteau envisageait déjà ce texte, correspondant uniquement à l’acte II, comme une œuvre potentiellement autonome.
Le dactylogramme intitulé « L’Antiquité » est immédiatement suivi d’un autre dactylogramme correspondant également à l’acte II seul, conservé à la BHVP. Cependant, ce second dactylogramme s’ouvre sur une scène intitulée « Prologue — Tableaux vivants », qui semble occuper les trois premières pages, bien que la troisième page soit manquante. Par ailleurs, la mention « ACTE II — La rencontre d’Œdipe et du Sphinx » figure en haut de la quatrième page et n’est pas dactylographiée, mais ajoutée à la main. Cela suggère qu’au moment de la transmission de ce document au transcripteur, l’acte premier n’avait pas encore été envisagé, ou que la structuration de l’œuvre en deux actes n’était pas encore définie.
En ce qui concerne l’acte premier, le premier dactylogramme succédant directement au manuscrit autographe faisait partie de l’ancienne collection du MLM. Sur la couverture de ce document figurent une dédicace de Cocteau à Charles de Noailles ainsi que plusieurs projets de titre, tous autographes. Les trois premières pages sont manquantes, et le texte de l’acte premier débute à la page 4. À l’instar du dactylogramme de l’acte II conservé à la BHVP, la mention « ACTE I » n’est pas dactylographiée mais a été ajoutée à la main.
Les dactylogrammes présentés ci-dessus relèvent de la « première phase de rédaction » du processus d’écriture. Ceux de la « seconde phase de rédaction », en revanche, comprennent l’ensemble des quatre actes ainsi que des textes annexes et se divisent en deux groupes distincts, correspondant à des étapes successives de la rédaction. Le premier groupe, relativement précoce, est constitué de deux exemplaires datés d’octobre 1932 : l’un conservé à la BHVP et l’autre à la BNF. Le premier semble avoir été utilisé par Cocteau lui-même, tandis que le second, envoyé par Cocteau à Jouvet, porte la mention manuscrite sur la couverture : « L’exemplaire de Jouvet / Remis le 5 février 1933 ». Le texte dactylographié de ces deux exemplaires est exactement identique, jusque dans les moindres détails, ce qui indique qu’il s’agit de copies réalisées à la même occasion. Toutefois, les corrections manuscrites diffèrent partiellement, et certaines du second exemplaire (celui de Jouvet) semblent postérieures à celles du premier, la plupart ayant été intégrées dans le second groupe de dactylogrammes[28].
Ce second groupe plus tardif comprend le dactylogramme ayant appartenu à Pierre Bergé, aujourd’hui conservé à la BHVP. Cocteau note sur la couverture : « Manuscrit exact en ce qui concerne les décors et certains jeux de scène du Sphinx. S’en servir pour compléter le texte définitif. Ajouter les nouveaux textes du guide. » – « les nouveaux textes du guide » désignent ceux de « La Voix » des actes III et IV. Une lettre d’envoi d’Henri Compère, de la Maison du Manuscrit, datée du 7 mars 1934, est jointe à cet exemplaire. Un ensemble de quatre brochures identiques, produit en décembre 1933 pour les répétitions, est également conservé. À la BNF, on trouve les brochures ayant appartenu à André Moreau, interprète de Créon, et Julien Barrot, régisseur chargé des éclairages et du son, qui incarnait également le fantôme de Laïus. La brochure de Barrot comporte des annotations spécifiques concernant les instructions d’éclairage et les effets sonores pour la première représentation. À la BHVP, une brochure d’origine inconnue est conservée, ainsi que celle ayant appartenu à Pierre Renoir, interprète de Tirésias. Cette dernière est la seule à être divisée en fascicules pour chaque acte, bien que la partie correspondant à l’acte II soit manquante.
En outre, un jeu d’épreuves en placard est conservé à la BNF, bien qu’il ne présente aucune trace de corrections manuscrites. Par ailleurs, comme mentionné précédemment, la BHVP conserve le dactylogramme de la traduction allemande Der Tod Der Sphinx, réalisée par Hans Feist. Dans le cadre de la présente étude, cette version allemande a été consultée de manière partielle afin de combler les lacunes des manuscrits français existants du « Prologue — Tableaux vivants ».
[1] Ventes aux enchères à l’Hôtel des Ventes à Genève, le 13 mars 2012 (lots 484 et 487). Pour le catalogue en ligne : https://static.piguet.com/sale/catalogs/special/piguet-24-84a45cf0-b619-11e5-88fd-2b1b632d11c9.pdf
[2] À l’exception de trois lots jugés patrimoniaux et rachetés par l’État pour être intégrés à la collection de la Bibliothèque nationale de France : le manuscrit autographe du Marquis de Sade, Les Cent Vingt Journées de Sodome, ainsi que ceux d’André Breton, Le Manifeste du surréalisme et Le Second Manifeste du surréalisme.
[3] La Bibliothèque nationale de France (Collection Louis Jouvet — Département des arts du spectacle, ci-après abrégée en BNF), la Bibliothèque historique de la ville de Paris (Fonds Jean Cocteau, ci-après abrégée en BHVP), l’ancien Musée des Lettres et Manuscrits à Paris (ci-après abrégé en MLM) et la Bibliothèque de l’Université Keio, Tokyo.
[4] La présente étude constitue une version révisée de travaux antérieurement publiés : Hiroyuki Kasai, « Pour une étude génétique de La Machine infernale de Jean Cocteau : Le processus d’écriture et l’examen des manuscrits », Kyoyo-ronso, n° 137, Hogaku-kenkyukai, Faculté de droit, Université Keio, Tokyo, Japon, 2016, p. 101-142 ; « Pour une étude génétique de La Machine infernale de Jean Cocteau : Essai d’une édition critique (1) », Revue de Hiyoshi. Langue et littérature françaises, n° 62, Comité de Publication de la Revue de Hiyoshi, Université Keio, Yokohama, Japon, 2016, pp. 85-188 ; « Pour une étude génétique de La Machine infernale de Jean Cocteau : Essai d’une édition critique (2) », Revue de Hiyoshi. Langue et littérature françaises, n° 63, Comité de Publication de la Revue de Hiyoshi, Université Keio, Yokohama, Japon, 2016, p. 75-154.
[5] Jean Cocteau, Opium. Journal d’une désintoxication, in Jean Cocteau, Romans, Poésies, Œuvres diverses, Paris, La Pochothèque / Le Livre de Poche, 1995, p. 678.
[6] Œdipe-Roi a été représenté pour la première fois au Nouveau théâtre Antoine, le 12 juillet 1937.
[7] À une étape initiale de la rédaction, Cocteau a élaboré un prologue sous la forme de tableaux vivants, mettant en scène la Nuit, Mercure et l’Amour. L’un des premiers plans, intitulé « La Mort du Sphinx », prévoyait également l’inclusion d’enregistrements des poèmes du recueil Opéra. Dans les versions ultérieures, des effets sonores, tels que l’utilisation d’un disque ou l’amplification par microphone, sont suggérés. La version finale publiée mentionne, pour sa part, l’usage d’un dialogue enregistré sur disque, près de la fin de l’acte II.
[8] Jean Cocteau, Lettres à sa mère, tome II, texte établi et annoté par Jean Touzot avec le concours de Pierre Chanel, Paris, Gallimard, 2007, p. 539, 546, 554, 556 et 557. David Gullentops et Dominique Marny, « Le Poète et la Princesse. Correspondance croisée Jean Cocteau – Natalie Paley », in Cahiers Jean Cocteau 13, Paris, Éditions Non Lieu, 2015, p. 34, 36 et 67-68.
[9] Selon un manuscrit intitulé « Préface » conservé à la BHVP, vraisemblablement rédigé à l’occasion de la première d’Œdipe-Roi (juillet 1937), on trouve le passage suivant (ce n’est pas le texte publié dans le programme) : « Je vous avouerai que la pièce [La Machine infernale] fut écrite de bric et de broc./D’abord le 2e acte, l’acte du Sphinx. Seul. Ensuite, le 1er acte, comme une sorte de prologue. Ensuite, une manière d’Œdipe-Roi. Ensuite, le fameux acte de la nuit de noces entre le fils et la mère. » Si l’on s’en tenait à ce témoignage, la pièce aurait été écrite dans l’ordre suivant : l’acte II – l’acte premier – l’acte IV – l’acte III. Toutefois, d’après les lettres adressées à sa mère et à Natalie mentionnées précédemment, les deux derniers actes ont en réalité été composés dans un ordre inverse : l’acte III – l’acte IV. Après avoir terminé la rédaction de l’ensemble de la pièce, Cocteau a dû apporter de nombreuses modifications à l’acte III, ce qui expliquerait cette confusion dans sa mémoire.
Dans un entretien avec André Fraigneau en 1951, Cocteau se remémore un souvenir similaire : « D’abord, j’avais fait un acte, l’acte du Sphinx, pour Baty et pour Jamois. Et puis j’ai fait le premier acte ; ensuite je n’ai pas fait le troisième acte, j’ai repris Œdipe roi et puis j’ai intercalé l’autre acte, l’acte du mariage d’Œdipe et de Jocaste. » (Jean Cocteau et André Fraigneau, Entretiens, Éditions du Rocher, 1988, p. 93). Ce qui est particulièrement intéressant dans ce témoignage, c’est que « l’acte du Sphinx », c’est-à-dire l’acte II, portait dès le début de l’écriture une potentialité d’œuvre indépendante, destinée à être jouée seule. Cette hypothèse est corroborée par l’existence du plus ancien dactylogramme de l’acte II, conservé à la Bibliothèque de l’Université Keio, qui porte le titre L’Antiquité et qui présente des descriptions des personnages, caractéristiques d’une pièce autonome. De surcroît, l’intention de Cocteau de confier cette œuvre à Gaston Baty et Marguerite Jamois, et de la monter au Théâtre Montparnasse — dirigé par Baty et récemment rénové — laisse imaginer une mise en scène novatrice avec un appareillage scénique modernisé.
[10] Le manuscrit autographe de l’acte IV, conservé à l’ancien MLM (notre sigle : m.IV), le groupe de dactylogrammes des quatre actes, conservés à la BNF et à la BHVP (notre sigle : d.3 et d.4), ainsi qu’une épreuve conservée à la BNF. Dans le manuscrit m.IV, Cocteau a d’abord écrit « Paris 1930 » avant de corriger en « Chablis 1930 ».
[11] « Tu recevras cette lettre à Chablis, j’imagine. », Lettre de Georges Auric à Jean Cocteau datée du 18 mars 1930. Georges Auric – Jean Cocteau. Correspondance, publiée par Pierre Caizergues, Centre d’étude du XXe siècle, Université Paul-Valéry, Montpellier, 1999, p. 118. « J’ai passé 2 jours à Chablis […] » Lettre à sa mère, s. d. [été 1930]. Lettres à sa mère, tome II, op. cit., p. 496.
[12] Christoph Wolter, Jean Cocteau et l’Allemagne. Mythes et réalité de la réception de son théâtre, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 181-209.
[13] « […] Par contre il y aurait intérêt de la [La Voix humaine] jouer avec votre nouvelle pièce. Celle-ci est-elle déjà assez avancée que cela serait possible ? Ayez la bonté de me câbler dès réception de la présente si vous êtes d’accord et si vous êtes à même de me faire parvenir votre nouvelle pièce. » Lettre de Hans Feist à Jean Cocteau datée du 22 avril 1930, Berlin, conservée à la BHVP. Souligné par Feist.
[14] Le dactylogramme de cette traduction allemande présente des différences entre la partie correspondant à l’acte II (« Zweiter Teil : Die Begegnung des Oedipus mit der Sphinx ») et les autres sections. Le format du papier utilisé pour l’acte II diffère visiblement, mesurant quelques centimètres de moins en hauteur. De plus, la couleur de l’encre (violette pour l’acte II, noire pour les autres) ainsi que les conventions typographiques (soulignement ou non des didascalies, espacement ou non à l’intérieur des parenthèses, etc.) varient. Il apparaît donc évident qu’il s’agit de contributions de différents dactylographes, ce qui pourrait indiquer des périodes distinctes d’envoi des manuscrits ou même des phases différentes de rédaction. Il est probable que Cocteau a d’abord envoyé à Feist la partie correspondant à l’acte II, celle-ci ayant été traduite en premier. Ce n’est qu’ultérieurement que l’acte premier, ainsi que les sections « Vorbemerkung » et « Prolog », auraient été expédiées. Par ailleurs, une lettre de Feist datée du 13 février 1932, dans laquelle il presse Cocteau de lui faire parvenir rapidement le texte du « Prologue », suggère que celui-ci a probablement été envoyé en dernier. Cette version allemande reflète ainsi les différentes étapes d’une écriture en mouvement. Sans les interventions, bien que quelque peu insistantes, de Feist, il est fort probable que ce manuscrit, à la dérive telle une épave, n’aurait jamais vu le jour.
[15] « La Mort du Sphinx », manuscrit conservé à la BHVP (notre sigle : m.mds).
[16] « Le Théâtre de Jean Cocteau » et « Le Théâtre grec » du recueil Opéra (1927).
[17] « — La Mort du Sphinx peut servir de prologue à l’Œdipe-Roi de Sophocle, adapté par l’auteur, ou se jouer seule, comporte un tableau vivant, un 1er acte : Le Fantôme et les Soldats, et un 2ème acte : La rencontre d’Œdipe et du Sphinx. », in « La Mort du Sphinx », op. cit.
[18] « Erster Teil : Das Gespenst und die Soldaten » reflète des révisions apportées sur un dactylogramme conservé à l’ancien MLM (notre sigle : d.I.1). De même, « Zweiter Teil :Die Begegnung des Oedipus mit der Sphinx » correspond de près à celui avec corrections conservé à la Bibliothèque de l’Université Keio (notre sigle : d.II.2).
[19] « La Bouche d’ombre », manuscrit autographe conservé à la BHVP (notre sigle : m.voix.II). Ce manuscrit présente des traces de révisions substantielles effectuées par Cocteau. Feist en a traduit la première version, avant ces modifications.
[20] Lettre à sa mère datée du 22 juillet 1932, Saint-Mandrier. Lettres à sa mère, tome II, op. cit., p. 539. La lettre de Feist datée du 13 février 1932 contient déjà un passage montrant que Cocteau envisageait le troisième acte à ce moment-là : « Mais quoi donc avec la troisième scène du Sphinx ? Est-elle vraiment nécessaire ? […] » Lettre à Jean Cocteau envoyée de Berlin le 13 février 1932 et conservée à la BHVP. Il s’est écoulé au moins cinq mois entre la conception du troisième acte et le début de sa rédaction.
[21] « J’ai enfin pu écrire ce 3e acte et je commencerai l’épilogue ce soir. » Lettre à sa mère, s.d. (supposée par Jean Touzot du 13 août 1932), Saint-Mandrier. Lettres à sa mère, tome II, op. cit., p. 546. « J’ai fait mon acte III et commencerai ce soir mon Épilogue […] » Lettre à Natalie Paley datée du 13 août 1932, Saint-Mandrier. Gullentops et Marny, « Le poète et la princesse, correspondance croisée », op. cit., p. 34.
[22] Télégramme à Natalie Paley daté du 17 août 1932, Saint-Mandrier. Ibidem,p. 36.
[23] Le manuscrit autographe de l’acte IV, conservé à l’ancien MLM (notre sigle : m.IV).
[24] « Ma maman bien-aimée, il y a eu le bal Bourdet et le lendemain (cette nuit) lecture chez eux de toute mon énorme pièce. […] La lecture m’a ému. Bourdet et tous n’ont rien critiqué et trouvent que c’est mon œuvre la plus importante. Hélas ! où trouver des acteurs capables de jouer les rôles écrasants d’Œdipe, de Jocaste et du Sphinx. » Lettre à sa mère, s.d. (supposée par Jean Touzot du 1er ou du 2 septembre 1932), Lettres à sa mère, tome II, op. cit., p. 554.
[25] « Demain, je recevrai ma pièce en dactylo et je la corrigerai. » Lettre à sa mère, s.d. (supposée par Jean Touzot vers le 10 octobre 1932), Lettres à sa mère, tome II, op. cit., p. 546. « Ma pièce est belle — copiée, mise au net. », Lettre à Natalie Paley, Tamaris, octobre 1932 in Gullentops et Marny, « Le poète et la princesse, correspondance croisée », op. cit., p. 68.
[26] Une lettre de Jouvet, adressée à Henri Compère de l’agence de copies dramatiques, datée du 20 décembre 1933, demandant la réalisation de brochures de répétition, est conservée à la BNF.
[27] Le dactylogramme de l’acte II, intitulé L’Antiquité, conservé à la Bibliothèque de l’Université Keio (notre sigle : d.II.1). Ces répliques proviennent de ce premier dactylogramme de l’acte II avant corrections et pourraient ainsi correspondre au texte des feuillets manquants du manuscrit autographe de cet acte.
[28] Un dactylogramme encore inexploré est un exemplaire dédié à Marco Brille, mis aux enchères en avril et décembre 2002. D’après les citations et les illustrations figurant dans les catalogues de vente, cet exemplaire semble appartenir au premier groupe de dactylogrammes. Cf. Tajan, Lettres et manuscrits autographes, livres dédicacés, dessins, lot 14, vente du 17 avril 2002 à l’Hôtel Drouot. Christie’s – Paris, Livres modernes et illustrés, lot 79, vente du 4 décembre 2002.