Cocteau et la forme
La poétique formelle de Cocteau a constamment oscillé entre deux pôles : la pratique fidèle ou renouvelée de l’instrument classique (le vers régulier, la rime) et la recherche d’une modernité.
La première voie, qui est originelle, sous-tend tout son parcours poétique et réapparaît régulièrement entre les périodes d’exploration formelle, comme avec les recueils Vocabulaire (1922) et Plain-Chant (1923) ; c’est en outre par la forme classique qu’il revient à la poésie après une période de silence poétique durant les années trente (Léone en 1945). La deuxième voie est multiple ; elle commence pendant la Première Guerre mondiale, avec les grands livres tirés de l’expérience de la guerre et publiés après : Le Cap de Bonne-Espérance et Le Discours du grand sommeil.
Un des modes majeurs d’exploration formelle de Cocteau est sans conteste le travail d’expérimentation sur la rime, et ceci dès les premiers recueils « modernes ».
Les autres modes de formalisme sont moins attestés : on trouve une disposition typographique spatialisée, situable quelque part entre Mallarmé et Reverdy, dans les grands recueils de la guerre (Le Cap) et dans quelques expériences de la même époque ; un poème comme La Crucifixion (1946) procède d’un travail profond sur la syntaxe et l’enjambement[1]. Pour le reste, la pratique formelle de Cocteau se fonde essentiellement sur une dialectique du vers régulier et du vers libre ou approximatif, et sur la rime comme principe formel du poème. C’est cet aspect qui constitue l’objet de notre étude.
La rime
La rime classique, régulière, instaure une relation entre deux vers (ou plus) du poème, par le truchement de leurs mots finals respectifs ; il s’ensuit que ce sont d’abord deux vers qui riment ensemble, et, consécutivement, les deux mots porteurs de la rime.
Le lien formel qui établit cette relation entre deux vers est fondé sur l’identité (ou l’équivalence) de la dernière voyelle masculine du dernier mot de chacun des deux vers, et sur celle des consonnes prononcées qui la suivent. Tant la définition stricte que la pratique de la rime classique présentent des modalités qui sont essentiellement limitatives (contraintes et restrictions) et qui postulent :
- l’identité en genre, c’est-à-dire la présence ou l’absence d’un e post-tonique à la suite de la voyelle et des éventuelles consonnes ;
- la « règle des deux couleurs » : « Une terminaison de vers n’est jamais séparée de son plus proche écho par plus d’un type de terminaison[2] » ;
- consécutivement, un écart ou une distance maximale séparant deux vers rimant et donc deux mots rimant ensemble : dans un poème où chaque rime ne s’applique qu’à deux vers (sans répéter plus de deux fois la même rime : abbbba), le nombre de vers qui peuvent séparer ces deux vers ne dépasse jamais deux : abba, et les deux mots rimants sont séparés par 3 vers au maximum ;
- conjointement, l’alternance des genres (toute nouvelle rime apparaissant dans la suite des vers est de genre différent de celle qui la précède et de celle qui la suit : dans ababcdcd, si a est féminin, c l’est aussi, et b et d sont masculins) ;
- l’équivalence des consonnes graphiques (sang, absent, encens et persan ne peuvent rimer les uns avec les autres en versification classique).
Axes et objets
Décrire les pratiques de Cocteau revient notamment à établir ce qu’il respecte ou rejette. Ainsi, on peut d’emblée situer sa pratique, en vers régulier, quant aux contraintes graphiques. Dans les recueils strictement réguliers (vers régulier et rime), il ne respecte généralement pas la règle des consonnes graphiques (Plain-chant, Léone), mais il la restaure dans quelques recueils de la fin de sa carrière : Le Chiffre sept (1952), Paraprosodies (1958), Cérémonial espagnol du phénix (1961), qui forment donc le niveau le plus classique ou régulier de sa versification[3].
Dans la ligne d’une telle pratique moderne et assouplie de la rime régulière, typique du XXe siècle, Cocteau ne respecte pas toujours l’identité en genre ; son degré de régularité à ce point de vue est fonction des époques, des recueils et des différentes esthétiques qui leur sont propres. Faire rimer un « masculin » avec un « féminin » est aussi pour lui un moyen, sinon d’expérimenter aussi spectaculairement que dans les procédés que nous allons examiner, du moins d’élargir et de renouveler les possibilités offertes par la rime phonétiquement correcte.
Cela étant, c’est essentiellement sur deux points capitaux que porte l’expérimentation de Cocteau : d’une part la forme de la rime, c’est-à-dire la partie du mot qui le fait participer à la relation rimique ; d’autre part, la position des mots rimants dans le texte, dans le vers, les uns par rapport aux autres. Il y a évidemment une combinatoire des deux axes : on le verra dans l’examen des poèmes.
S’agissant d’expérimentation, la pratique à observer se fonde pour une bonne part sur l’écart à la norme et sur la variation. L’observation rencontre donc des difficultés méthodologiques liées à la nature des objets impliqués (les « rimes ») et au fonctionnement même de ces pratiques. En cherchant à déterminer les éléments, aspects et conditions de la rime sur lesquels Cocteau fait porter son expérimentation, nous serons notamment confrontés à la notion de « limite » : à partir de quelles conditions minimales deux mots peuvent-ils être identifiés comme « rimant » ensemble ? quelle distance maximale peut séparer ces deux mots ?
Deux autres questions accompagnent l’observation : les écarts ou pratiques de Cocteau relèvent-ils de la transgression, de l’assouplissement, du renouvellement, de la variation ? est-il toujours pertinent d’appeler « rimes » les phénomènes attestés, qui sont néanmoins fondés sur la matérialité (sonore ou plus rarement graphique) des mots ?
La forme de la rime
Quelles formes peut prendre le lien formel qui unit deux mots ? Sur quels éléments se fonde ce lien ?
Quels que soient la forme du vers et le mode de disposition des rimes, la majorité des paires (ou triplettes) de mots « rimant » entre eux dans un poème le font par leur finale : la dernière voyelle masculine, la coda consonantique prononcée, éventuellement la consonne d’appui et parfois plus haut (deux syllabes). Appelons-la rime orthodoxe.
Mais on observe chez Cocteau quatre types de liens qui divergent de ce régime classique de la rime ; ils constituent un travail de variation et d’expérimentation sur la nature et la substance de la partie commune aux deux mots « rimant » ensemble.
1. La rime imparfaite (qu’on appelle parfois assonance), qui postule l’homophonie de la voyelle finale et l’hétérophonie des consonnes suivantes.
Quelques exemples, tous tirés du recueil Opéra (1927) : ciel :: Marseille ; hanche :: anges ; vagues :: algues ; quelconque :: quinconce ; Montmartre :: Marthe ; colombes :: sombrent ; l’automne :: homme ; maraudent :: robes ; fille :: fil ; Tibre :: tigre ; langue :: d’ange ; chaloupe :: loups ; boucs :: boucles ; moutons :: m’étonne.
On notera que la plupart de ces rimes imparfaites sont soutenues à gauche (consonne d’appui) et/ou à droite (consonnes partiellement identiques), phonétiquement ou (plus rarement) graphiquement (chaloupe :: loups)[4].
Chez Cocteau, la rime imparfaite n’est jamais systématique dans le poème : elle y est toujours associée à la rime orthodoxe ; elle en constitue une variante purement localisée, procédant d’un relâchement de la rectitude de celle-ci.
2. La contre-assonance est employée dans les mêmes conditions : elle est assez rare (peut-être plus fréquente que la rime imparfaite) ; elle consiste, dans sa forme la plus complète, en l’identité de la coda consonantique et de la consonne d’appui, sans identité de la dernière voyelle. Deux exemples, dans le poème « Baigneuse[5] » (Vocabulaire, 1922 : OPC, p. 304 ; PG2, p. 45) : effarouche :: autruches, autruches :: riches.
Associée à la rime régulière et à la rime imparfaite, tout comme celle-ci elle n’est jamais systématique ni disposée régulièrement (comme c’est le cas chez Tristan Derème, par exemple).
Elle peut être peu visible, surtout quand elle n’est pas finale de vers (cf. infra). Quand elle figure en fin de vers, la pression du contexte (les autres vers riment de façon orthodoxe) amène à voir rapidement que deux vers « riment » par contre-assonance. Mais la question reste posée des éventuelles contre-assonances et de leur repérage dans d’autres contextes.
3. Ce qu’on peut appeler rime décalée, ou rime non terminale : deux mots riment par une séquence commune qui figure, dans au moins un des deux, ailleurs qu’à sa fin. Exemple (« Par lui-même », Opéra, 1927 : OPC, p. 517) :
Accidents du mystère et
fautes de calculs
Célestes, j’ai profité d’eux, je l’avoue.
Toute la poésie est là : Je décalque
L’invisible (invisible à vous).
Une des toutes premières attestations est aussi la plus régulière : dans le recueil Embarcadères, qui date de la fin de la Première Guerre mondiale et est resté inédit jusqu’en 1986, on trouve trois poèmes en vers libres apparents qui sont en réalité des sonnets réguliers (en alexandrins) redistribués en vers libre (camouflés) — les poèmes « Vacances », « Lune », « Voile »[6]. Dans ces sonnets, deux mots riment, systématiquement, l’un par le début ou le milieu et l’autre par sa finale. Dans la version finale, après redistribution en vers libres, le segment est marqué par un trait d’union quand il est interne, mais la rime est quand même quasi totalement dissimulée, de même que le vers régulier. Voici, à titre d’exemple, le premier quatrain de « Vacances » (OPC, p. 144) dans sa forme originelle et sa redistribution en vers libres :
Phosphore le filet pâle nos soles tamb- ourinent leur mort au fond mouillé de la pir- ogue La lune (qui aveugle) sur mes jambes d’Indien et mon pagne rouge de fakir […] | Phosphore le filet pâle nos soles tamb-ourinent leur mort au fond mouillé de la pir-ogue La lune (qui aveugle) sur mes jambes d’Indien et mon pagne rouge de fakir |
Ce type de rime décalée, non terminale, se fonde dans quelques cas sur un jeu qui porte sur un proclitique et l’inclusion d’un mot dans un autre ou dans une expression. Les deux exemples suivants sont tirés du Cap de Bonne-Espérance, 1919, dans un contexte de vers libre spatialisé, non de vers régulier (« Parabole de l’enfant prodigue » : OPC, p. 67 et 73 ; PG1, p. 122 et 130).
Sport aube un réveil blême d’Amphitrite exécutions capitales les petites vagues frileuses l’une après l’autre se baignent au bord de la mer jouant aux osselets […] |
[…] la chiourme de pesanteur sur les traces du captif en train de fuir lâche ses soldats et ses meutes […] |
On comprendra que le repérage de telles rimes non terminales de mots est nettement moins aisé qu’en fin de vers (régulier), et que se pose la question de la distance maximale que l’on peut supposer entre deux mots rimant de la sorte.
4. Le quatrième type ne se fonde plus sur le phonétisme, mais sur la graphie. Très rare et généralement sporadique ou isolée, la rime graphique structure pourtant tout le poème « Vénus et l’amour » (en marge de Vocabulaire : OPC, p. 347) :
Ivre sur le toit du bateau
Plus morte que vive, la langue
Nettoie un phoque de lagune
Sous les frisures du tabac.
Le cheval sauvage, le bock,
Sur la digue de rage aiguë
Et les vergues et les virgules,
Des hirondelles du bivouac.
Bourrez d’elles votre valise
Je connais un hamac ; asile
D’ailes, d’écumes et de fleurs.
Un mousse avec sa mère y rame
Et cette blanche mousse amère
Se retrousse avec le reflux.
On voit que la rime graphique peut être, dans sa forme la plus complète, anagrammatique, totalement (langue :: lagune) ou partiellement (valise :: asile, fleurs :: reflux, rame :: amère)[7].
La position des rimes
La question de la position des mots rimants porte : soit sur la position des mots-rimes dans le vers ; soit sur la position absolue et relative des points du texte (mots) mis en liaison par une « rime ».
Deux grandes tendances s’observent dans la poésie de Cocteau, dès lors qu’elle rime :
- une disposition régulière (par exemple en quatrains, ou en rimes plates), où les mots qui riment sont situés en fin de vers (qu’il s’agisse de vers strictement isométriques, ou de vers approximatifs, par exemple autour de 8 syllabes) — selon cette disposition classique, ce sont les vers qui riment entre eux, par le biais de leurs mots finals ;
- des écarts volontaires par rapport à cet usage régulier et aux contraintes qui lui sont liées ; ils sont de deux ordres et peuvent éventuellement se combiner dans un même poème :
a. La rime interne : un au moins de deux mots qui riment ensemble ne se trouve pas à la fin mais à l’intérieur (ou au début) du vers ;
b. La rime distante : l’écart entre deux mots rimant est supérieur à deux vers, et peut même être assez grand ; deux mots rimant sont séparés par plus d’une autre rime ; la règle des deux couleurs n’est donc pas respectée. La question des couleurs perd d’ailleurs toute pertinence quand on est en présence de rimes internes (c’est-à-dire quand les deux écarts se combinent), surtout en contexte de vers libre, et quand tous les vers ne sont pas pourvus de mots-rimes (finals ou internes).
Les premières pratiques « déviantes » fondées sur
ces deux écarts apparaissent en contexte de vers résolument libre dans le
recueil Le Cap de Bonne-Espérance (1919), déjà cité : deux poèmes,
« Géorgiques funèbres » et « Parabole de l’enfant
prodigue », y présentent des rimes (parfois très) distantes, sans aucune
régularité quant à leur densité générale ou locale, les distances attestées
entre deux mots-rimes ou leur position dans le vers ; un extrait de la
« Parabole » (OPC, p. 70-71 ; PG1,
p. 127-128) :
[…]
la mer
miroite
luge ascenseurs
balançoire montagnes russes
l’Estérel rose
à droite
ovation de toute chose à la lumière
encaustique éblouie de l’aile
un plan de plus en plus net
des fêtes après le déluge
haschisch du vide
périssoire enchantée
banc si mince
courroie du siège
Les aventures du grand Vizir
et d’un magicien mandchou
le Prince
consulte sa boussole
et divers accessoires magiques
sous son turban
de cuir
de fourrure
de verre
de liège
d’aluminium
et de caoutchouc
toit constellé du palais des pieuvres
des éponges
un déclic
l’hélice une pale puis
l’autre puis
les pales
on voit les
pales
où flambe
une loterie d’azur
le moteur se tait
l’aéroplane
plonge à pic
dans le vide
Les mots-rimes figurent aussi bien à l’intérieur qu’au bout des vers, un second mot peut apparaître loin après le premier (plonge), après plusieurs mots-rimes et plusieurs vers sans rimes (périssoire). C’est la libération totale à l’égard de la métrique régulière qui entraîne, comme corollaire, l’écart majeur que constitue l’abolition de ces deux contraintes positionnelles liées à la rime classique (du vers régulier) contraintes : position dans le vers, distance entre les mots. Il s’ensuit que, dans un tel poème, on ne peut plus considérer que deux vers riment ensemble : la notion de vers, surtout si elle se fonde sur la rime, est quasi totalement abolie ; rime et vers ne sont plus liés. La rime ne ponctue pas les vers, ne les associe pas, ne structure pas le poème selon eux. Consécutivement, ce ne sont plus que les mots qui riment entre eux ; en d’autres termes, la rime associe des mots dans un texte, et non plus des vers (réguliers ou libres). Elle se réduit à un principe formel portant sur le poème tout entier : la rime donne de la forme au poème, en l’absence de vers régulier. On peut synthétiser la combinaison de la rime interne et de la rime distante en dénommant cette forme innovante (qui s’oppose à la rime orthodoxe et finale) rime éclatée ou rime globale — en ce qu’elle concerne tout le poème et non plus les vers, et qu’elle n’obéit plus à aucune contrainte positionnelle.
En dehors des deux poèmes du Cap, la rime globale est relativement florissante chez Cocteau durant la Première Guerre mondiale. Sa forme peut être dense, comme dans « Malédiction au laurier » (Discours du grand sommeil [1916-1918], dans Poésie 1916-1923, 1925: OPC, p. 419-420 ; PG1, p. 187-188) :
Tu écartes dans tous les sens tes branches,
Soleil du soir, cerisier en fleurs.
Voici de Mars en nous que déferlent
Embruns d’amour inconnus sur les dunes.
Ici ne furent semés qu’hommes bleus
Qui, soudain, poussent jusqu’au ciel.
Ici les vergers ne peuvent pas naître.
Le sol est un ours gourmand d’ignoble miel.
Mais ailleurs, je sais que le printemps naît
Comme Vénus, des vagues de la terre.
Aidé par les chiens, le laitier, l’angélus,
Par les coqs rempailleurs de cris, par la forge,
Par la rumeur en détail d’un village à des kilomètres,
Par moi, Vénus, qui me meurs.
Je sens avec délice en moi les folles bulles
D’où tu jaillis comme un bouchon d’or,
Vénus ! debout sur la mer: feu grégeois,
Char des marins au carnaval de Nice.
Que pourrait-il sortir de notre mer morte?
Les arbres d’ici sont des épouvantails.
Maintenant le soleil est dans la mer du Nord.
Il ne reste que les projecteurs de la côte.
Ces projecteurs aveugles font des gestes
D’automate, tâtant les angles d’un plafond.
Il ne reste plus que du froid carré,
Que cette fusillade leste,
Que ces garçons français et allemands, statues
Face à face, cassées par des secousses,
Que ce laurier de gloire qui pousse
Sans joie, uniquement nourri de marbre.
Laurier inhumain, que la foudre
D’Avril te tue.
voire saturée, comme dans les 16 très courtes strophes de « Désespoir du Nord » (Discours du grand sommeil : OPC, p. 447-448 ; PG1, p. 234-235) :
RienA que l’aérostatB, cibleC soutenueD
Par les angesE de l’église :
PaysageF invisiblecG à l’œilH nud
Si tu changese de fauteuilh, aérienab visagefg.
ou au contraire plus raréfiée, comme, par exemple, dans « La jeune fille rayonnante » (Embarcadères, OPC, p. 148).
Le retour ultérieur à une métrique régulière s’accompagne naturellement d’une restauration de la rime orthodoxe et régulière (finale), mais l’invention antérieure de la rime globale (interne) constitue un acquis formel que Cocteau va assez fréquemment associer à la forme régulière ; ainsi, dans plusieurs poèmes de Vocabulaire (1922), par exemple dans « Les Yeux doux » (OPC, p. 314 ; PG2, p. 65) :
Tristesse, engrais de mes
bonheurs. Il nous termine,
Ce grillage, partout sorti des encriers.
Napoléon, apiculteur aux gants d’hermine
Le jour du sacre, avec un bonnet de lauriers
Et des pantoufles
de nacre.
Cygne
mourant, si doux à entendre crier,
Fais le sang noir, en quoi sont écrites ces lignes.
Combinées aux rimes finales orthodoxes, les rimes internes multiplient les points rimants du texte : chaque vers rime, parfois deux fois ; aucun vers n’est orphelin, mais deux vers riment de finale à interne (5 et 7).
Un autre exemple : « Les Mésaventures d’un
rosier » (Vocabulaire : OPC, p. 322 ; cf.
PG2, p. 75) est un texte beaucoup plus long (192 vers en tercets dont les
deux premiers vers comptent 6 syllabes et le troisième un nombre libre) qui
présente une grande densité de rimes, finales et internes, mais aussi plusieurs
vers orphelins (16 % des vers sont sans rime, finale ou interne). En
outre, l’écart entre deux mots rimants peut être très élevé, comme le montre
l’extrait suivant (les 18 premiers vers) :
Rougis des Hespérides !
Et des formes que prend
Le diable au Paradis.
Verges que Noël pose
Dans les sabots, quel feu
Quelle eau !
Un radis, c’est la rose
En bouton, à l’envers
Dans le tombeau.
Pour tenir chaud l’hiver
Penche l’arbre des pommes
Sur ce rosier.
Dépêchez-vous, garçons ;
Elle se ride.
Prenez garde à la berge.
Dans le fleuve de verre
Bouge l’ondine.
Le système des rimes est ici tout autant dissimulé que manifesté. Le poème présente une apparence de vers blancs jusqu’à la première rime suffisamment proche : rose :: pose, qui toutefois ne respecte pas les deux couleurs et ne suffit pas d’emblée à signaler le poème comme étant beaucoup plus rimé qu’il n’y paraît ; les autres rimes sont parfois très distantes : Hespérides :: ride (14 vers), verges :: berge (12 vers).
Par-delà cette variation dans l’application du procédé, on constate donc que Cocteau a importé dans une pratique régulière (le vers régulier et la rime finale) l’acquis d’une pratique liée au vers libre et produite par lui.
Le système
Conçus comme des écarts à la norme (la métrique régulière), les deux types d’innovations formelles — formes et positions de la rime — se combinent fréquemment ; on l’a vu aussi bien dans le vers régulier (« Vénus et l’amour », ci-dessus), où des rimes internes doublent les rimes graphiques[8], et dans les poèmes en vers libre de la Première Guerre mondiale (la « Parabole » et « Désespoir du Nord »), où certains liens sonores sont non terminaux.
Le vers libre sans rime est somme toute minoritaire, voire assez rare dans l’œuvre de Cocteau, même dans les années 1915-1930. Le vers libre étant au minimum suspect à ses yeux[9], cela signifie que la rime, quand le vers n’est pas régulier, assume la fonction formalisante dans le poème — partant, la fin du vers libre perd son statut métrique ou formel, et le texte peut rimer en n’importe quel point des vers. La rime supplée à l’informel métrique ; moyennant sa présence, le vers libre reste ou redevient un vers. Concluons que la rime est pour Cocteau un principe formel au moins aussi puissant que le vers mesuré, et qu’elle peut suffire à donner de la forme au poème :
Se libérer de la forme fixe (à moins qu’on ne s’abandonne aux rythmes vagues du vers libre) oblige le poète à une méthode individuelle. Son instinct la lui découvre et, une fois découverte, il s’en sert pour discipliner son instinct. (Préface du Cap de Bon-Espérance, OPC, p. 6.)
Par la suite, les rimes internes et les rimes non orthodoxes réapparaissent régulièrement, tout comme, dans une moindre mesure, les rimes distantes. Du côté du vers libre, il faut mentionner le poème L’Ange Heurtebise (1926), qui constitue le point culminant de la rime globale dans l’œuvre de Cocteau et où les liens sonores qui structurent et même génèrent le texte de ses 16 strophes participent de toutes les formes observées ; rimes internes et distantes, rimes imparfaites, contre-assonances, rimes non terminales, rimes graphiques[10]. Quant aux recueils métriquement réguliers (totalement, imparfaitement ou partiellement), ils intégreront souvent, selon les cas et à des degrés divers, les deux alternatives formelles, qu’il s’agisse des vers tantôt réguliers tantôt approximatifs de Neige ([1947] 1956) ou du Requiem (1962), ou des vers totalement réguliers de Clair-obscur (1954)[11].
On peut se demander s’il est toujours pertinent d’appeler « rimes » les phénomènes attestés, qu’ils portent sur la forme du lien ou sur la place des mots liés. Certes, par nature ils s’écartent plus ou moins violemment des traits définitoires et conditions de la rime classique, mais on notera d’abord qu’ils restent fondés sur la matérialité (sonore ou plus rarement graphique) des mots ; ensuite, que Cocteau parle à leur propos de « rime » :
Tel
qui jadis me voulut mordre,
Voyant ma figure à l’envers,
Comprendra soudain que mes vers
Furent les serviteurs de l’ordre.
Il sera vite mon ami,
Disant : Commit-il autres crimes
Que de distribuer ses rimes
Tant au bout des vers que parmi[12].
Le cas des rimes internes et des rimes non orthodoxes en vers régulier montre que (toute) la recherche de Cocteau procède de la rime classique, dont elle entend varier, distendre et étendre les principes, par variation et soustraction de traits fonctionnels relatifs à la nature de la rime ou à sa position.
Si l’on tient le mot, le vers et le poème pour trois niveaux hiérarchiques de la structure du texte, on voit que les pratiques de Cocteau (la rime globale) retirent partiellement ou totalement à la rime son incidence sur le niveau intermédiaire (le vers) pour la concentrer sur les extrêmes : le mot et le poème.
Sur le premier plan, le point commun à toutes les pratiques est de généraliser et de diversifier le même phénomène : l’appel d’un mot par un autre, la liaison qu’ils entretiennent sur une base phonétique (ou graphique) ; puis, sur le second plan, d’étendre et de généraliser la liaison entre deux points du texte que la rime classique produit entre deux (fins de) vers.
La rime de Cocteau, orthodoxe et non orthodoxe, régulière ou globale, constitue un mécanisme de formalisation du texte poétique. Sa fonction est double : aider à la production formelle du texte par l’association des mots entre eux sur base phonétique et assurer à la fois la poéticité du texte et l’effet esthétique qui y est lié :
Un système de rimes en tous sens flatte l’oreille. (Préface du Cap de Bon-Espérance, OPC, p. 7.)
La poésie plus concise, plus construite, plus dessinée que la prose, tirant de la rime ou des contraintes de rythme une perpétuelle surprise aussi mystérieuse et fraîche pour le poète que pour le lecteur, la poésie cessera enfin d’être une prose en robe du soir. (Le Secret professionnel, 1922.)
Or ces fonctions sont déjà celles de la rime classique. On considérera donc le système formel de Cocteau comme un procédé évolutif qui, fondé sur le maintien et la suppression de traits originels, reste néanmoins de même nature que la rime.
Ce système admet une grande variabilité ; on a mentionné l’opposition de la saturation ou de la densité et de la raréfaction, tendances dont Cocteau avait conscience : pour la seconde, « surtout dans un certain chant du Cap de Bonne Espérance. Un grand nombre de rimes s’y distribuent à des intervalles qui ne permettent d’en percevoir qu’une rumeur » (Le Secret professionnel, 1922).
À l’opposé, il a pu prétendre : « J’ai même / essayé de rimer tous les mots / des poèmes » (« Buste », en marge de Vocabulaire : OPC, p. 345). Si un tel objectif est quasi impossible, un calcul opéré sur quelques-uns des poèmes cités montre le taux auquel peut culminer la densité qu’il a pu viser ; dans « Parabole de l’enfant prodigue », 17 mots sur 100 participent aux rimes ; par comparaison, dans un poème classique comme Léone, en alexandrins et sans rimes internes, 13 % seulement ; dans « Malédiction au laurier », 20 % ; dans « Les Mésaventures d’un rosier », 29 % ; dans L’Ange Heurtebise, 39 % ; dans « Désespoir du Nord », 43 %. « Rimer tous les mots », du poème, c’est donc, au maximum, faire rimer quatre mots sur dix : les poèmes les plus denses correspondent, grosso modo, à ce que serait un poème rimé en vers de 4 syllabes.
Méthode, repérage, seuils
L’étude de tels phénomènes, volontairement déviants, pose la question de leur repérabilité et du seuil d’acceptabilité :
- à partir de quel volume (de combien de phonèmes communs) une rime imparfaite, une contre-assonance ou une rime non terminale est-elle perceptible et peut-on supposer qu’il y en a une ?
- comment repérer les rimes internes et distantes dans un poème ? Quelle distance maximale est tolérable en régime de rime globale (distante) pour que l’on puisse assurer ou supposer qu’il y a rime ?
Pour répondre à ces questions, il y a lieu de distinguer le point de vue de la production et celui de la réception.
On pourrait considérer qu’il y a rime dans le texte dès que des conditions minimales sont remplies. Par exemple quand deux mots présentent la même finale, quelle que soit la distance qui les sépare dans un poème très long, ou quand deux mots proches présentent le même segment interne. Mais il s’agit d’observer une pratique plus ou moins systématique, c’est-à-dire de dégager le système des procédés appliqués par le poète, dans plusieurs poèmes, avec ou sans variation. Le point de vue de la réception, c’est-à-dire de la perception, doit donc tenir compte de celui de la production : ce sont les limites du système pratiqué par le poète qui constituent notre objet, non les potentialités abstraites de la langue.
Le système (double) décrit n’est pas appliqué d’une façon monolithique dans tous les poèmes :
- il faut d’abord se demander s’il y a rime ; il existe en effet des poèmes en vers libres sans rimes, ou si rares qu’elles peuvent être fortuites (ainsi, du Cap de Bonne-Espérance, seuls les deux poèmes cités présentent des rimes : dans les autres, le système de la rime globale n’est pas en jeu ; ils ne riment pas) ;
- dans certains poèmes les rimes non orthodoxes sont visiblement évitées (certains poèmes en vers réguliers), alors qu’elles constituent le point culminant de la sophistication dans d’autres (« Désespoir du Nord », L’Ange Heurtebise).
Le repérage des candidats au statut de mots rimant dans le texte n’est pas immédiat mais progressif, et nécessite une méthode. Certains liens pourtant pertinents ou probables échappant à une première lecture, le point de vue du récepteur n’est dès lors pas suffisant. L’élaboration progressive de critères fondés sur l’observation permet de tracer des seuils en deçà desquels une rime potentielle est rejetée. Ces seuils sont approchés en tenant compte de l’acquis, c’est-à-dire du reste du poème (les liens déjà repérés et avérés) et des autres poèmes.
C’est donc l’existence de rimes manifestes qui conduit à en chercher d’autres dans un même poème. Les cas avérés par leur proximité justifient les plus éloignés. On sera d’autant plus tolérant aux cas douteux que les cas manifestes seront nombreux. En leur absence, on préférera rejeter une paire candidate. Pour accepter une paire de mots comme « rime », on postulera que deux facteurs, volume et distance, doivent se cumuler positivement, ou au moins se compenser. Un segment long répété à peu de distance sera préféré à un segment très court (une voyelle) à grande distance ; plus la distance sera grande, plus le segment devra être épais ou remarquable pour être accepté comme rime.
Dans un poème en vers réguliers ou approximatifs (ou même en vers libres) où certains vers riment de façon orthodoxe, le contexte exerce une pression qui facilite et autorise le repérage d’éventuelles rimes non orthodoxes. Ainsi, dans « Calendrier mécanique » (Vocabulaire : OPC, p. 336), les « rimes » en fin de vers sont :joufflue :: regonfle, îlot :: vélo, régates :: nougatine, papillons :: papilles, artistes :: baptise, château :: bateau ; c’est l’existence des rimes orthodoxes (la 2e et la 6e) qui induit le repérage des rimes décalées (3e et 5e) et même de la plus faible (1ère).
Des exemples courts comme « Vénus et l’amour » ou « Les Yeux doux » montrent que les rimes internes dans les poèmes en vers réguliers sont généralement directement visibles. En conséquence, il est possible de chercher toutes les rimes internes d’un poème de moyenne longueur comme « Malédiction au laurier » et d’arrêter des limites simples.
En revanche, dans un poème bien plus long, comme « Les Mésaventures d’un rosier », la distance la plus grande que j’ai tolérée est de 34 vers. Le critère d’acceptabilité doit intégrer l’épaisseur phonétique du segment rimant : deux mots en -a ou en –é (sans consonne d’appui) ne peuvent raisonnablement rimer que s’ils sont très proches — sous peine de faire rimer tout avec tout… En revanche, plus une rime est longue et/ou rare, ou spécifique au lexique de l’auteur, plus elle est acceptable à une grande distance.
En général, de tels poèmes, où la rime en fin de vers n’est pas la règle, ne paraissent pas contenir de rime non orthodoxe interne. Mais il suffit qu’un poème présente un ou plusieurs cas spectaculaires ou manifestes pour que se pose la question d’autres attestations.
Le cas de « Désespoir du Nord » est assez simple : la densité des rimes les signale à l’attention, une lecture attentive et répétée permet de repérer toutes les rimes finales de mots ; il n’y a pas de problème à accepter tous les homéotéleutes ; vu la brièveté des strophes, la question de la distance ne se pose pas. Certaines rimes non orthodoxes invitent à chercher les autres, selon un critère d’épaisseur minimale.
La recherche des « rimes » dans un poème dense comme L’Ange Heurtebise s’est faite selon une méthode particulière, par une traduction totale du poème en alphabet phonétique et la recherche automatique par programme de toutes séquences récurrentes d’au moins deux phonèmes dont un au moins est une voyelle.
C’est l’étude de ces deux poèmes qui a révélé les cas de rimes non terminales, dont celles qui portent sur des proclitiques, et permis de repérer, par exemple, au bord et la chiourme dans la « Parabole ».
On voit donc que les poèmes les plus riches révèlent le double système du poète (rime globale, rime non orthodoxe), mais que son application n’est pas uniforme d’un poème et d’une période à l’autre : les rimes peuvent être globales sans être non orthodoxes, ou l’inverse. Chaque poème doit donc être analysé, les rimes doivent y être repérées selon des critères partiellement propres, mais fondés sur l’expérience acquise dans l’observation des cas (les poèmes) les plus évidents. Aucune méthode ou grille unique et rigide ne pouvant être utilisée, l’observateur doit s’adapter à chaque objet, dans la recherche constante d’un équilibre entre l’application de critères progressivement construits et le recours prudent à l’intuition.
La définition de l’objet et de ses modalités s’intègre
constamment dans la description détaillée d’une pratique concrète, celle d’un
poète qui expérimente la forme en opérant sur l’instrument traditionnel une
action systématique et complexe de variation à la norme. Étudier un tel objet
consiste à chercher du système, à l’ordonner, dans un corpus textuel qui
procède du double principe de l’ordre (« mes vers / Furent les serviteurs
de l’ordre ») et de la liberté créatrice. C’est aussi en cela que l’objet
en question présente un intérêt d’ordre méthodologique et théorique[13].
[1] Voir Alain Chevrier, « Phrase versus vers dans La Crucifixion de Jean Cocteau », dans Formes Poétiques Contemporaines, n° 13,2018, Presses Universitaires de Liège, pp. 27-40.
[2] Benoît de Cornulier, Art poëtique. Notions et problèmes de métrique, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1995, p. 267.
[3] Notons un cas intéressant : dans son premier recueil, La Lampe d’Aladin (1909), la règle de l’s n’est pas respectée, mais elle est convertie en une espèce de règle du pluriel : les mots en –es riment régulièrement avec ceux en –ent, jamais avec ceux en –e ; elle peut s’énoncer comme suit : deux pluriels riment ensemble, deux singuliers aussi. S’agit-il d’une mauvaise connaissance ou compréhension de la règle ? (la « règle de l’s » devenant la « règle des pluriels ») ou plutôt d’une première marque d’expérimentation sous la forme d’un écart contrôlé par rapport à l’usage ? (la transgression se limite à la substitution d’un système à un autre, comme dans les rimes androgynes de Verlaine ; sur celles-ci, voir Dominique Billy, « La rime androgyne : d’une métaphore métrique chez Verlaine », in Michel Murat, Le Vers français : histoire, théorie, esthétique [Université Paris-Sorbonne, 3-4 octobre 1996], Paris, Champion, 2000, pp. 297-347.
[4] On observe une même tendance à l’épaississement des rimes imparfaites chez Apollinaire ; cf. Gérald Purnelle, « Apollinaire et la rime (deuxième partie) », dans Apollinaire. Revue d’études apollinariennes, n°13, 2013, pp. 29-54.
[5] Les références aux poèmes renvoient aux Œuvres poétiques complètes [OPC] parues en 1999 dans la Pléiade, sous la direction de Michel Décaudin, et, le cas échéant, aux deux volumes parus dans la collection « Poésie/Gallimard » : Le Cap de Bonne-Espérance suivi de Discours du Grand Sommeil [PG1]; Vocabulaire, Plain-Chant et autres poèmes (1922-1946) [PG2].
[6] Je les ai étudiés en les comparant à un procédé comparable (la redistribution en vers libres, et non la rime non terminale) dans trois poèmes de Mont-de-Piété de Breton, contemporains (1916-1917) ; cf. G. Purnelle, « Camouflage et dislocation : de l’alexandrin au vers libre chez Breton et Cocteau », in La Revue des lettres modernes, série Jean Cocteau, n° 4, « Poésie critique et critique de la poésie », textes réunis et présentés par Monique Bourdin, Lettres modernes Minard, Paris-Caen, 2003, p. 113-153 ; dans le même volume, sur le même sujet, voir aussi David Gullentops, « Présence de l’alexandrin dans Embarcadères », p. 155-182.
[7] Le poème présente en outre tout un système de rimes internes (aux vers) qui implique des mots qui riment soit entre eux soit avec les mots finals, cf. infra. Enfin, s’agissant d’un sonnet, la disposition des rimes graphiques paraît réaliser le schéma classique en abba abba ccd eed.
[8] Il y a combinaison de la forme des rimes et de leur position : la transgression ou l’écart sur un plan se combine avec la régularité sur l’autre plan : le poème rime de façon orthodoxe à l’intérieur des vers et par innovation à la fin du vers (ce qui assure une visibilité aux rimes graphiques).
[9] « Le vers libre : cette Capoue » in Le Secret professionnel, op. cit., p. 182.
[10] Cf. G. Purnelle, « Les échos sonores dans L’Ange Heurtebise de Cocteau : une étude formelle », in Michel Murat et Jacqueline Dangel (éd.), Poétique de la rime [Colloque international de la Société d’Étude du Vers (SEV), en Sorbonne, 8 et 9 décembre 2000], Paris, Champion, 2005, pp. 431-456.
[11] Rappelons les recueils les plus classiques, dont rimes internes ou non orthodoxes sont (quasi) totalement absentes : Plain-chant (1923), Léone (1945), Le Chiffre sept (1952), Paraprosodies (1958), Cérémonial espagnol du phénix (1961).
[12] « M’entendez-vous ainsi ? » dans Vocabulaire : OPC, p. 341 ; PG2, p. 103.
[13] Nous n’avons pas examiné les rimes annexées des trois poèmes intitulés « Cocardes » (« Miel de Narbonne », « Bonne d’enfant » et « Enfant de troupe », OPC, pp. 205-206), où la fin d’un vers rime avec le début du suivant ; ces poèmes sont décrits et analysés par David Gullentops dans David Gullentops, Ann Van Sevenant, Les Mondes de Jean Cocteau. Poétique et Esthétique, éd. Non Lieu, 2012 — dans une perspective poétique et génétique au chapitre « Manuscrits » de la partie « Poétique : analyse » (p. 108-111) ; les pratiques que nous avons examinées sont abordées tout au long dudit chapitre (p. 85-187) et ailleurs dans l’ouvrage (p. 20, 25-27).